La Guerre Des Drones: DJI Attaque Le Département De La Défense Américain En Justice

Les tensions sino-américaines atteignent de nouveaux sommets dans la guerre des drones. DJI, le géant chinois et leader incontesté du marché des drones grand public, vient de porter plainte contre le Département de la Défense américain. En cause : son inscription sur une liste noire d’entreprises accusées de collaborer avec l’armée chinoise. Un véritable séisme dans l’industrie technologique.

DJI dans le collimateur de Washington

Depuis plusieurs années, DJI fait l’objet d’une intense pression de la part des autorités américaines. En 2020, l’entreprise avait déjà été placée sur la fameuse « Entity List » du Département du Commerce, qui interdit de fait aux sociétés américaines de commercer avec elle sans autorisation spéciale. L’année suivante, le Département du Trésor avait enfoncé le clou en intégrant DJI à sa liste noire des investissements, invoquant une potentielle implication dans la surveillance de la minorité ouïghoure en Chine – ce que l’entreprise a fermement nié.

DJI n’est pas détenue ou contrôlée par l’armée chinoise, et le DoD lui-même reconnaît que DJI fabrique des drones grand public et commerciaux, pas des drones militaires.

– Un porte-parole de DJI

Mais c’est son inscription en 2022 sur la liste des « entreprises militaires chinoises » du Pentagone qui a fait déborder le vase. Après 16 mois de tentatives infructueuses de dialogue avec le DoD, DJI a décidé de saisir la justice fédérale. L’entreprise affirme subir un préjudice financier et réputationnel continu, ses employés étant stigmatisés et harcelés.

La Chine, ennemi technologique numéro 1 ?

Au-delà du cas DJI, c’est toute la relation technologique sino-américaine qui est en jeu. Washington multiplie les mesures pour contrer ce qu’il perçoit comme une menace grandissante de Pékin :

  • Restrictions sur les exportations de semi-conducteurs
  • Gel des collaborations scientifiques
  • Pressions sur les alliés pour exclure Huawei de la 5G

Cette escalade s’inscrit dans un contexte de rivalité globale, où l’innovation est devenue un enjeu de souveraineté. La Chine investit massivement pour rattraper son retard dans les technologies clés comme l’IA ou la robotique. De son côté, l’Amérique de Biden cherche à endiguer ce qu’elle voit comme des transferts technologiques abusifs, tout en sécurisant ses propres chaînes d’approvisionnement.

Vers une « splinternet » technologique ?

Au final, le procès intenté par DJI illustre les crispations d’une véritable guerre froide technologique. Alors que la Chine et les États-Unis s’affrontent pour la domination du 21e siècle, le risque est grand de voir émerger deux écosystèmes techno-économiques séparés, avec des standards, des brevets et des applications différentes.

Loin de l’idéal originel d’un internet ouvert et sans frontières, ce « splinternet » obligerait les autres pays à choisir leur camp. Pour les entreprises comme pour les consommateurs, les conséquences pourraient être lourdes en termes de coûts, d’innovation et d’interopérabilité. Il est donc crucial que le dialogue prévale sur la confrontation, afin de préserver les bénéfices de la mondialisation technologique.

À lire également