Le géant mondial des semi-conducteurs ARM vient d’annoncer un changement majeur dans sa stratégie commerciale. Jusqu’à présent, la société britannique se contentait de concevoir des architectures de puces et d’en licencier les plans à des fabricants tiers comme Apple ou Nvidia. Mais cette année, ARM va se lancer dans la fabrication de ses propres processeurs, avec un premier client de taille : Meta, la maison-mère de Facebook.
Un processeur taillé pour les data centers
Selon le Financial Times, qui a révélé l’information, le premier processeur maison d’ARM sera un CPU destiné aux serveurs des grands data centers. Il pourra être personnalisé en fonction des besoins de chaque client. Sa production sera sous-traitée à des fondeurs tiers, ARM ne disposant pas de ses propres usines.
Ce nouveau processeur, dont le lancement est prévu pour cet été, marque un tournant stratégique majeur pour ARM. En devenant fabricant de puces, la société va se retrouver en concurrence directe avec certains de ses propres clients et licenciés comme Qualcomm ou Samsung.
ARM a une opportunité unique de capter davantage de valeur sur le marché des puces, au moment où la demande explose avec l’essor de l’IA et du cloud computing.
Meta, un client de poids pour lancer cette nouvelle activité
Pour son entrée dans l’arène très concurrentielle de la fabrication de puces, ARM a choisi de frapper fort en s’alliant avec un client prestigieux : Meta, qui exploite certains des plus grands data centers au monde pour faire tourner ses réseaux sociaux et ses centres de recherche en IA.
Avec ARM, Meta va pouvoir optimiser ses coûts et ses performances en collaborant directement à la conception de puces sur mesure, au lieu de passer par des intermédiaires. Une approche similaire à celle d’Amazon et Google, qui conçoivent déjà leurs propres processeurs en interne.
- L’arrivée d’ARM sur ce marché bouscule un secteur déjà en pleine recomposition avec l’essor de nouveaux acteurs très innovants comme Graphcore ou Cerebras dans le domaine de l’IA.
- À terme, ARM ambitionne de proposer toute une gamme de processeurs customisables pour le cloud, l’edge computing et l’IA.
- Son modèle associant conception et production pourrait faire des émules, en permettant une meilleure intégration entre matériel et logiciel.
Une menace pour les équilibristes du secteur ?
Ce repositionnement d’ARM n’est pas sans risque. La société doit veiller à ne pas trop froisser ses partenaires historiques, alors même qu’elle s’apprête à entrer en Bourse. Son principal actionnaire Softbank mise en effet sur une IPO dans les prochains mois pour renflouer ses caisses.
ARM va devoir faire preuve d’un grand sens politique pour ne pas être perçu comme une menace par les autres acteurs du secteur. Son positionnement d’arbitre neutre entre les différents fabricants de puces était jusqu’ici un atout. En devenant lui-même un acteur du marché, ARM s’expose à des conflits d’intérêts.
Un pari sur l’avenir de l’informatique
Malgré ces risques, la décision d’ARM apparaît rationnelle au vu des grandes transformations à l’oeuvre dans l’industrie des semi-conducteurs :
- Les besoins en puissance de calcul explosent, tirés par l’IA, la 5G, la réalité virtuelle…
- La spécialisation des puces s’accélère, avec des architectures de plus en plus optimisées par type d’application.
- Les géants du cloud et de la tech veulent maîtriser leurs propres designs de puces pour garder un coup d’avance.
Dans ce contexte, ARM ne pouvait pas rester un simple fournisseur de propriété intellectuelle. En lançant ses propres puces avec Meta, le groupe fait un pari audacieux sur l’avenir de l’informatique. Un pari risqué, mais visionnaire, qui pourrait en faire l’un des grands gagnants de la prochaine révolution du silicium.