Last Energy Lève 100 Millions Pour Micro-Réacteurs

Imaginez un monde où les data centers voraces en énergie des géants de l’IA comme OpenAI ou Google pourraient fonctionner grâce à des réacteurs nucléaires compacts, livrés comme des containers et installés en quelques mois. Ce scénario, qui semblait encore relever de la science-fiction il y a quelques années, devient réalité grâce à des startups audacieuses comme Last Energy. En décembre 2025, cette jeune pousse vient de boucler une levée de fonds impressionnante de 100 millions de dollars pour accélérer le déploiement de ses micro-réacteurs nucléaires. Une nouvelle qui illustre parfaitement le retour en force du nucléaire dans le paysage tech et entrepreneurial.

Dans un contexte où la consommation énergétique explose avec l’essor de l’intelligence artificielle et des infrastructures cloud, les solutions traditionnelles peinent à suivre. Les énergies renouvelables intermittentes ne suffisent plus seules, et c’est là que le nucléaire nouvelle génération entre en scène. Last Energy propose une approche radicale : des réacteurs petits, modulaires, et surtout pensés pour être produits en série. Une révolution qui pourrait changer la donne pour les entrepreneurs et les entreprises tech avides de puissance fiable et décarbonée.

Le grand retour du nucléaire dans l’univers des startups

Il y a encore cinq ans, parler de nucléaire dans les cercles startups relevait du tabou. Trop cher, trop risqué, trop lent. Mais les mentalités ont radicalement changé. Bret Kugelmass, fondateur et CEO de Last Energy, le confirme sans détour :

« Pendant la première moitié de la décennie où je disais aux gens que je faisais du nucléaire, je devais les convaincre : « Hé, voilà pourquoi le nucléaire est important ». Maintenant, tout le monde vient nous voir en disant : « Oh oui, bien sûr que le nucléaire fait partie de la solution ». »

– Bret Kugelmass, fondateur et CEO de Last Energy

Ce revirement n’est pas anodin. Il s’explique par l’explosion des besoins énergétiques des data centers, ces usines invisibles qui alimentent nos IA, nos clouds et nos applications quotidiennes. Les géants du web cherchent désespérément des sources d’énergie stables, propres et disponibles 24/7. Le nucléaire petit format apparaît comme la réponse idéale.

Last Energy n’est d’ailleurs pas seule sur ce créneau. Le secteur fourmille de concurrents qui lèvent des sommes folles : X-energy (soutenu par Google) a récolté 700 millions le mois dernier, Antares 96 millions il y a deux semaines, et Aalo Atomics 100 millions en août. Preuve que les investisseurs flairent la bonne affaire dans cette renaissance nucléaire.

Une technologie simple, robuste et radicalement différente

Ce qui distingue Last Energy de la concurrence, c’est son choix technologique audacieux : reprendre un design ancien de réacteur à eau pressurisée, initialement développé pour le navire marchand nucléaire NS Savannah dans les années 1960, et le moderniser.

Mais l’innovation majeure réside dans l’encapsulage. Chaque cœur de réacteur est enfermé de manière permanente dans une énorme coque d’acier de 1 000 tonnes. Pas de maintenance prévue pendant la durée de vie. Le réacteur arrive sur site déjà chargé avec six ans de combustible uranium. Seules des connexions électriques et de contrôle traversent cette barrière d’acier impénétrable.

La chaleur produite par les réactions de fission réchauffe l’acier, et de l’eau circulant dans des tuyaux à l’extérieur récupère cette chaleur pour produire de la vapeur et actionner une turbine. À la fin de sa vie, le réacteur reste sur place : la coque d’acier sert directement de conteneur de stockage des déchets. Plus besoin de gestion complexe des déchets radioactifs.

Bret Kugelmass explique ce choix surprenant :

« La plupart des gens pensent que le béton est moins cher. Mais pas quand il s’agit de béton de qualité nucléaire. »

– Bret Kugelmass, à propos du coût de l’acier vs béton

L’acier, estimé à environ 1 million de dollars par unité, devient ainsi une solution économique et ultra-sécurisée. Une simplicité radicale qui vise à casser les codes du nucléaire traditionnel, souvent critiqué pour sa complexité et ses dépassements budgétaires.

Des réacteurs taille XXS pour une production XXL

Les réacteurs commerciaux de Last Energy délivreront 20 mégawatts d’électricité, de quoi alimenter environ 15 000 foyers… ou un data center de taille moyenne. Mais la startup commence plus petit : un pilote de 5 MW est en construction sur un site loué à l’université Texas A&M.

La levée de fonds de 100 millions, menée par l’Astera Institute avec des participants comme Gigafund (lié à Elon Musk), Galaxy Fund ou encore JAM Fund (Justin Mateen de Tinder), va entièrement financer ce projet pilote et préparer la commercialisation.

Le calendrier est ambitieux : mise en service du pilote dès l’année prochaine (2026), et production des unités commerciales de 20 MW à partir de 2028. Une accélération rendue possible par la modularité et la fabrication en série.

Pourquoi les data centers sont le marché parfait

Les data centers représentent aujourd’hui le Graal pour ces startups nucléaires. Avec l’explosion de l’IA générative, leur consommation énergétique devrait tripler d’ici 2030 selon certaines estimations. Les hyperscalers comme Amazon, Microsoft ou Google signent déjà des accords massifs pour du nucléaire modulaire.

Pour une entreprise tech, disposer de son propre micro-réacteur offre plusieurs avantages décisifs :

  • Indépendance énergétique totale
  • Énergie décarbonée pour atteindre les objectifs net-zéro
  • Coûts prévisibles sur le long terme
  • Installation rapide comparée aux grands réacteurs
  • Empreinte au sol réduite

Imaginez une startup IA qui installe son propre réacteur derrière son campus de serveurs. Plus de dépendance au réseau électrique local, plus de fluctuations de prix, et une image de marque renforcée auprès des investisseurs sensibles au climat.

La promesse d’une énergie nucléaire enfin abordable

Le nerf de la guerre reste le coût. Le nucléaire traditionnel souffre d’une réputation de projets pharaoniques avec des dépassements budgétaires chroniques. Last Energy veut briser cette malédiction grâce à la production de masse.

Kugelmass évoque la loi d’expérience observée dans d’autres industries : diviser les coûts par deux à chaque multiplication par dix de la production. Même si le nucléaire gardera des coûts fixes réglementaires, la tendance devrait être fortement baissière.

La vision est claire : ne plus penser en unités isolées, mais en dizaines de milliers de réacteurs déployés mondialement. Une industrialisation qui rappelle l’approche de Tesla pour les batteries ou SpaceX pour les fusées : standardiser, modulariser, scaler.

Les défis qui restent à relever

Malgré l’enthousiasme, le chemin reste semé d’embûches. La réglementation nucléaire reste lourde, même pour ces petits réacteurs. Aux États-Unis, la NRC (Nuclear Regulatory Commission) doit encore valider pleinement ces nouveaux designs.

La sécurité, bien que renforcée par le concept d’encapsulage permanent, devra être démontrée de manière irréfutable. Et l’acceptabilité sociale : même petits, ces réacteurs resteront nucléaires aux yeux du public.

Enfin, la concurrence est rude. NuScale, TerraPower (soutenue par Bill Gates), Kairos Power ou encore Oklo (qui prépare une introduction en bourse) avancent aussi leurs pions. La course est lancée pour savoir qui dominera ce marché naissant.

Une opportunité business colossale pour les entrepreneurs

Pour les entrepreneurs et investisseurs du secteur tech, cette vague nucléaire ouvre des perspectives fascinantes. Au-delà des fabricants de réacteurs, tout un écosystème émerge :

  • Services d’installation et maintenance spécialisée
  • Logiciels de monitoring et contrôle à distance
  • Financement structuré de projets énergétiques
  • Assurances adaptées au risque nucléaire modulaire
  • Intégration avec les infrastructures data centers

Les startups qui sauront se positionner sur ces niches adjacentes pourraient connaître une croissance explosive. Et pour les entreprises tech classiques, intégrer le nucléaire dans leur stratégie énergétique devient un avantage compétitif majeur.

Conclusion : vers une nouvelle ère énergétique ?

La levée de fonds de Last Energy n’est qu’un symptôme d’un mouvement plus profond. Le nucléaire modulaire s’impose comme une solution crédible pour concilier explosion de la demande énergétique et impératifs climatiques. Dans un monde où l’IA et le digital redessinent l’économie, l’accès à une énergie abondante, propre et fiable devient un facteur clé de compétitivité.

Les entrepreneurs visionnaires l’ont compris. Ceux qui sauront intégrer ces nouvelles technologies énergétiques dans leur stratégie business prendront une longueur d’avance. Last Energy et ses concurrents ne construisent pas seulement des réacteurs : ils participent à redéfinir les fondations mêmes de notre infrastructure numérique.

Le nucléaire, longtemps laissé pour mort, renaît sous une forme compacte, industrielle et entrepreneuriale. Une renaissance qui pourrait bien alimenter la prochaine vague d’innovation technologique mondiale.

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