Dans un contexte de tensions croissantes avec les annonceurs, allant jusqu’à poursuivre en justice un groupe ayant boycotté sa plateforme, X (anciennement Twitter) opère un virage stratégique majeur. Le réseau social a annoncé une refonte de son modèle de rémunération des créateurs, abandonnant le système basé sur les revenus publicitaires au profit d’une approche centrée sur l’engagement généré par les utilisateurs Premium.
Un changement de paradigme pour les créateurs
Auparavant, les créateurs percevaient un pourcentage des recettes publicitaires générées par les annonces affichées sous leurs publications. Désormais, X rémunèrera directement les créateurs en fonction de l’engagement suscité par leurs contenus auprès des utilisateurs Premium. Cette évolution pourrait bien bouleverser la nature des contenus qui dominent la plateforme.
En effet, lorsque les plateformes récompensent l’engagement, les créateurs ont tendance à privilégier les publications susceptibles de déclencher des réactions, quitte à susciter la colère ou la controverse. Ce phénomène, parfois qualifié de rage bait, pousse les algorithmes à mettre en avant ce type de contenus dans les fils d’actualité des utilisateurs.
Les défis d’Instagram Threads face à l’engagement toxique
Ironiquement, le rival d’X, Instagram Threads, est déjà confronté à ce problème. Adam Mosseri, responsable d’Instagram, a récemment reconnu que « tous les commentaires ou réponses ne sont pas bons » et que Threads constatait une augmentation des contenus conçus pour susciter l’indignation. L’entreprise s’efforce actuellement de juguler cette tendance.
Plus il y aura d’abonnements Premium au total, plus vous pourrez gagner de l’argent.
– X
X mise sur l’engagement à tout prix
X semble emprunter la direction opposée, sans indiquer de mesures visant à limiter l’engagement toxique. Au contraire, l’entreprise affirme que les créateurs gagneront davantage d’argent grâce à ce nouveau système. Bien que les détails des pourcentages de rémunération n’aient pas été divulgués, X laisse entendre qu’ils augmenteront en raison des opportunités accrues d’engagement, maintenant que les paiements ne dépendent plus de la publicité.
Ce nouveau modèle pourrait répondre aux inquiétudes des créateurs concernant la baisse de leurs revenus, alors que X perd des annonceurs en raison de boycotts et d’autres facteurs. De plus, les abonnés Premium voient moins de publicités, voire aucune pour ceux qui ont souscrit à l’offre Premium+, devenue totalement sans pub en août dernier.
De nouvelles règles du jeu pour la monétisation sur X
Pour être éligibles à la monétisation sur X, les créateurs doivent être vérifiés (abonnés à Premium), compter au moins 500 followers Premium et avoir généré au moins 5 millions d’impressions sur leurs publications au cours des trois derniers mois. Ces critères avaient déjà incité les créateurs à produire des contenus et des fils de discussion visant principalement à attirer les réponses et l’attention, modifiant ainsi la nature des échanges sur la plateforme.
- X a peu de garde-fous au-delà des limites sur le spam, les contenus illégaux et les promotions.
- Les contenus restreints comme les contenus pour adultes ou les discours de haine peuvent faire l’objet d’une monétisation « restreinte ».
Un timing préoccupant à l’approche des élections américaines
Avec cette nouvelle politique de rémunération basée sur l’engagement des abonnés, il est probable que les créateurs génèrent davantage de contenus clivants. Cette annonce intervient à quelques semaines des élections américaines, un timing qui pourrait favoriser la diffusion de rage bait politique, y compris de la désinformation comme des deepfakes créés par IA, dans le but d’attirer l’attention.
Alors qu’X s’écarte de plus en plus des annonceurs traditionnels, ce virage stratégique soulève de nombreuses questions quant à l’avenir de la plateforme et à son impact sur le discours public. Entre la course à l’engagement et les risques de dérives toxiques, le réseau social devra trouver un équilibre délicat pour préserver la qualité des échanges tout en assurant la pérennité de son modèle économique.
- X s’appuiera-t-il uniquement sur ses utilisateurs Premium pour générer des revenus ?
- Quelles mesures seront mises en place pour limiter la propagation de contenus problématiques ?
Les prochains mois seront décisifs pour X, qui devra prouver sa capacité à concilier rentabilité et responsabilité dans un environnement numérique de plus en plus complexe.