Ben Horowitz déclare la guerre à Michael Moritz

Une dispute virulente sur les réseaux sociaux entre deux investisseurs milliardaires de la tech, Ben Horowitz et Michael Moritz, soulève de sérieuses interrogations quant à l’indépendance journalistique du média d’information SF Standard, fondé il y a trois ans et financé uniquement par Moritz.

L’affaire a débuté jeudi soir, lorsque Horowitz s’est emporté sur la plateforme X (anciennement Twitter), qualifiant de « minable article à charge » une enquête en cours de SF Standard à son sujet et celui de sa femme Felicia. Selon lui, Moritz utiliserait « son faux journal de désinformation » pour fabriquer des articles diffamatoires contre lui, son « rival en affaires ». Marc Andreessen, associé de Horowitz, a rapidement embrayé pour appuyer ces accusations et en rajouter une couche d’insultes.

Des questions embarrassantes pour SF Standard

Cette polémique place SF Standard dans une situation délicate. Contactés par TechCrunch, ni le rédacteur en chef Jon Steinberg, ni Michael Moritz n’ont souhaité commenter le fond de l’affaire avant la publication de l’article. Steinberg s’est contenté de confirmer qu’une journaliste, Emily Shugerman, travaillait bien sur un papier à propos des Horowitz.

Par le passé, le média a couvert à la fois les actualités concernant Horowitz, Andreessen et Moritz, notamment au sujet des vastes terres rurales au nord de San Francisco que les entrepreneurs et investisseurs de la tech, dont Moritz et Andreessen, sont en train d’acquérir.

Un scoop qui vire au règlement de comptes

Ce qui aurait pu être un scoop intéressant sur l’influence grandissante des capitaux technologiques dans l’immobilier rural se retrouve noyé sous un règlement de comptes acerbe et stérile entre capitaines d’industrie, laissant planer le doute sur les motivations réelles du financeur unique du média.

Avoir son faux journal de désinformation qui fabrique des articles à charge sur son rival en affaires, moi.

– Ben Horowitz sur X (ex-Twitter)

Si des investissements immobiliers douteux existent, leur révélation perd en puissance avec une telle mise en scène, qui cristallise l’attention sur des querelles d’ego. Un magnifique auto-sabordage orchestré par les principaux intéressés.

L’impossibilité d’un journalisme indépendant ?

Au-delà des chamailleries puériles, cette affaire met en lumière les difficultés extrêmes à construire un journalisme local de qualité et véritablement indépendant dans la baie de San Francisco, entre les coupes claires dans les rédactions traditionnelles et la prédation de nouveaux titres par des oligarques qui les modèlent à leur guise.

La mainmise d’un seul investisseur sur un média, aussi intègre et doué soit-il, n’est jamais une bonne nouvelle pour la liberté de la presse. L’exemple de Jeff Bezos et du Washington Post, souvent cité pour minimiser ce risque, reste une exception fragile dans un univers médiatique sous perfusion des tech billionaires et de leurs desiderata.

La transparence, meilleure arme contre l’ingérence

Dans ce contexte, la seule façon pour SF Standard de se défaire de tout soupçon serait d’adopter une transparence totale sur son financement et son fonctionnement, bien au-delà des exigences légales : détailler les garanties d’indépendance dont dispose la rédaction, rendre publics les engagements et la non-ingérence de l’actionnaire, voire ouvrir la gouvernance à des personnalités extérieures irréprochables. En un mot, construire un contre-pouvoir interne qui seul permettrait de restaurer la confiance.

En attendant ces hypothétiques bouleversements, gageons que la publication imminente de l’article sur les Horowitz, s’il est honnête et équilibré, devrait déjà donner le ton de ce dont le titre est capable – ou non – en terme d’indépendance. L’avenir du journalisme dans la Silicon Valley en dépend.

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