En cette fin d’année 2024, la France a été secouée par une vague de cyberattaques ciblant plusieurs collectivités locales. Revendiquées par le groupe de hackers pro-russes NoName05716, ces offensives numériques ont perturbé les sites internet de nombreuses villes et départements à la veille du Nouvel An. Si les conséquences semblent pour l’instant limitées, ces incidents soulèvent des questions cruciales sur notre cybersécurité et notre positionnement géopolitique dans un monde de plus en plus connecté.
Une Offensive Massive et Coordonnée
C’est dans la nuit du 31 décembre 2024 au 1er janvier 2025 qu’une série d’attaques informatiques a frappé simultanément plusieurs municipalités françaises. De Marseille à Bordeaux en passant par Nantes, Nice ou encore Poitiers, les sites web officiels de ces villes ont été rendus inaccessibles pendant plusieurs heures. Au total, ce sont plus d’une dizaine de collectivités qui ont été touchées par cette offensive massive, comme l’ont confirmé les autorités dans les jours suivants.
Rapidement, la piste d’un acte malveillant coordonné s’est dessinée. Le groupe de pirates informatiques NoName05716, connu pour ses positions pro-Kremlin, a en effet revendiqué la paternité de ces cyberattaques via un message publié sur sa chaîne Telegram. Pour ces hackers, il s’agissait de démontrer leur capacité de nuisance numérique et de célébrer ce qu’ils qualifient de « France russophobe », dans un contexte de tensions géopolitiques exacerbées entre l’Occident et Moscou.
Des Dégâts Limités Mais Des Failles Exposées
Fort heureusement, les conséquences de ces attaques semblent pour l’instant relativement limitées. La plupart des sites web ont pu être rétablis dans les heures suivant les premières perturbations grâce à l’intervention des équipes techniques. Les données sensibles des administrés n’auraient pas non plus été compromises selon les premières constatations.
Néanmoins, cette vague de cyberattaques met en lumière la vulnérabilité persistante de nos infrastructures numériques face à des groupes organisés et déterminés. Malgré les progrès réalisés ces dernières années en matière de cybersécurité, force est de constater que des failles existent toujours et peuvent être exploitées à des fins malveillantes. C’est un signal d’alerte qui doit être pris très au sérieux par les pouvoirs publics comme par les acteurs privés.
L’ANSSI En Première Ligne
Face à cette situation, l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI) a été immédiatement saisie pour analyser l’ampleur des dégâts et formuler des recommandations. Cette autorité, véritable bras armé de l’État en matière de cybersécurité, va devoir travailler main dans la main avec les collectivités touchées pour renforcer leurs dispositifs de protection.
Il s’agira notamment de comprendre par quels vecteurs les pirates sont parvenus à s’introduire dans les systèmes, afin de pouvoir colmater ces brèches rapidement. Un audit complet des infrastructures et des protocoles de sécurité devra également être mené pour identifier d’éventuelles autres vulnérabilités. Enfin, des formations et des exercices de gestion de crise pourront être proposés aux agents pour les préparer à faire face à de nouvelles cyberattaques.
La cybersécurité n’est plus seulement l’affaire des experts, elle doit devenir l’affaire de tous. C’est un enjeu de souveraineté nationale qui nécessite une prise de conscience collective et des investissements à la hauteur des menaces.
Guillaume Poupard, directeur général de l’ANSSI
La Souveraineté Numérique Européenne En Question
Au-delà du cas français, cette nouvelle démonstration de force des hackers pro-russes pose la question de notre dépendance technologique et de notre capacité à assurer notre sécurité dans le cyberespace. À l’heure où les tensions géopolitiques s’invitent de plus en plus dans le monde numérique, il devient urgent pour l’Europe de renforcer son autonomie stratégique dans ce domaine.
Cela passe par une coopération accrue entre les États membres, un soutien renforcé à notre écosystème d’entreprises innovantes et des investissements massifs dans la recherche et la formation. Des initiatives comme la création d’un cloud souverain européen ou le développement de solutions de cybersécurité « made in Europe » vont dans le bon sens mais doivent encore monter en puissance.
Car c’est bien notre souveraineté et notre modèle de société qui sont en jeu derrière ces questions techniques. Dans un monde de plus en plus connecté et digitalisé, notre capacité à maîtriser nos données et à protéger nos infrastructures critiques conditionne largement notre avenir. Il est donc plus que temps de faire de la cybersécurité une priorité politique et économique de premier plan, au niveau national comme européen.
- L’ANSSI a annoncé un renforcement des contrôles et des audits de sécurité pour les administrations et les opérateurs d’importance vitale en 2025.
- Un plan d’investissement de 1 milliard d’euros sur 5 ans dans la cybersécurité a été annoncé par le gouvernement français fin 2024.
- La Commission Européenne prévoit de présenter sa « Cyber Resilience Act » au premier semestre 2025 pour renforcer les exigences de sécurité des produits numériques.
Alors que 2025 débute sur fond de cybermenaces, gageons que cette nouvelle année soit celle d’un sursaut en matière de cybersécurité. Car dans un monde plus que jamais en proie aux turbulences, c’est aussi sur ce front invisible que se joue une partie de notre avenir commun.