Le constructeur de véhicules électriques Fisker, actuellement en faillite, fait face à une vive opposition du Département de la Justice américain (DOJ) concernant son plan controversé de faire payer les propriétaires pour les réparations liées à de multiples rappels. Selon un nouveau dossier, le DOJ, s’exprimant au nom de la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA), affirme que ce « stratagème » viole la loi nationale sur la sécurité du trafic et des véhicules à moteur à plusieurs égards.
Un plan de rappel qui bafoue les droits des consommateurs
Mi-septembre, Fisker avait annoncé son intention de faire payer les propriétaires pour les coûts de main-d’œuvre liés à deux rappels, l’un concernant les poignées de porte de son SUV Ocean, l’autre une pompe à eau défectueuse pouvant entraîner une perte de puissance. Si l’entreprise est revenue sur cette décision dans un premier temps, elle a finalement confirmé fin septembre que les propriétaires devraient bien assumer ces frais pour des réparations pourtant légalement requises.
Le DOJ souligne dans son dossier que la distinction entre coûts des pièces et coûts de main-d’œuvre n’a « aucune signification juridique » en ce qui concerne le respect de la loi sur la sécurité des véhicules. Il rappelle clairement que tous les coûts associés à la correction des véhicules défectueux et non conformes doivent être couverts par le constructeur.
La loi sur la sécurité est claire : tous les coûts associés à la correction des véhicules défectueux et non conformes doivent être couverts par le constructeur.
– Département de la Justice américain
Une faillite qui ne dispense pas des obligations légales
Le DOJ souligne également qu’en vertu de la section 30120(a) de la loi sur la sécurité, le dépôt d’une demande de mise en faillite par un fabricant en vertu du chapitre 7 ou du chapitre 11 n’annule pas l’obligation du fabricant de se conformer à la loi. Tenter de plafonner le montant des fonds disponibles pour les rappels « n’a aucun fondement juridique » et viole spécifiquement la loi sur la sécurité, affirme-t-il.
Certains propriétaires ont déjà payé de leur poche les frais de main-d’œuvre liés à ces réparations sous garantie, comme le révèle le dossier. Le DOJ écrit qu’il ne s’oppose pas à ce que ces clients soient remboursés d’une manière ou d’une autre, « car ils n’auraient pas dû avoir à payer pour ce travail en premier lieu ».
Une audience décisive à venir
Face à cette situation, le DOJ a fait part de son objection au plan de règlement proposé par Fisker, qui détaille les étapes de liquidation du reste de l’entreprise. Ce plan pourrait être confirmé par un juge dès mercredi lors d’une audience précédemment programmée. La NHTSA indique avoir contacté les avocats de Fisker, ainsi que les représentants de ses créanciers et le bureau du syndic américain, proposant des révisions du plan qui permettraient de « résoudre » son objection.
Cette opposition du DOJ intervient dans un contexte déjà tumultueux pour Fisker. La Securities and Exchange Commission (SEC) des États-Unis a révélé vendredi qu’elle enquêtait sur la startup et lui avait envoyé plusieurs assignations à comparaître. Elle s’est également opposée au plan de règlement, craignant en partie que Fisker n’ait pas pris les mesures appropriées pour préserver les dossiers de l’entreprise. Le propriétaire du dernier siège social de Fisker a aussi soumis un dossier affirmant que l’entreprise avait laissé le bâtiment dans un « désordre total ».
Un avenir incertain pour Fisker
Avec cette opposition ferme du DOJ et les multiples problèmes juridiques et financiers auxquels fait face Fisker, l’avenir du constructeur de véhicules électriques apparaît plus qu’incertain. Son plan de faire porter le coût des rappels sur les consommateurs, en plus d’être illégal, risque de sérieusement entacher sa réputation et la confiance des acheteurs potentiels.
Reste à voir si Fisker parviendra à soumettre un plan de règlement amendé qui satisfasse les autorités et lui permette de se restructurer, ou si cette controverse signera la fin définitive de l’aventure pour la startup automobile. L’audience de mercredi sera cruciale pour déterminer le sort de l’entreprise.
Ce cas met en lumière les défis auxquels sont confrontées les jeunes entreprises automobiles, en particulier dans le secteur très concurrentiel et capitalistique des véhicules électriques. Il souligne aussi l’importance pour ces acteurs de respecter scrupuleusement leurs obligations légales et réglementaires, même en cas de difficultés financières, sous peine de s’exposer à de sérieux revers juridiques et réputationnels pouvant précipiter leur chute.