Le soutien affiché de certains des investisseurs les plus riches et influents de la Silicon Valley à la campagne présidentielle de Donald Trump en 2024 a choqué une partie de la communauté des fondateurs noirs. Bien que certains capital-risqueurs comme Doug Leone de Sequoia, Keith Rabois de Khosla Ventures ou David Sacks de Craft Ventures soient connus pour leurs positions conservatrices, l’annonce cette semaine du soutien de Marc Andreessen et Ben Horowitz, les fondateurs du célèbre fonds Andreessen Horowitz (a16z), en a étonné plus d’un.
Un sentiment de trahison
Pour certains entrepreneurs noirs, ce soutien à un candidat dont les politiques pourraient nuire aux personnes de couleur est vécu comme une trahison, en particulier venant de Ben Horowitz. Ce dernier était en effet perçu comme un allié de la communauté afro-américaine. Avec sa femme Felicia Wiley Horowitz, qui est noire, ils avaient multiplié les actions en faveur de cette communauté, organisant des événements et offrant des espaces de réseautage pour les professionnels noirs de la tech.
Sa réputation va définitivement en prendre un coup auprès des Noirs bien pensants, car cela montre qu’il ne comprend pas vraiment nos expériences vécues.
– David Mullings, fondateur de Blue Mahoe Holdings
La déception est d’autant plus grande que Ben Horowitz avait souvent mis en avant son amour du hip-hop et des leçons tirées de la révolution haïtienne, ainsi que son amitié avec l’activiste et ex-chef de gang Shaka Senghor. Apprendre qu’il soutiendra Trump pour ses positions sur la régulation des cryptomonnaies et la fiscalité en a heurté plus d’un.
Privilégier ses intérêts personnels ?
Pour un fondateur nigérian-américain qui a souhaité rester anonyme, « il semble que l’intérêt personnel et le profit l’emportent sur les gens ». Beaucoup s’interrogent désormais sur la sincérité de l’engagement de Ben Horowitz et de son fonds a16z en faveur de l’inclusion et de l’égalité des chances pour les entrepreneurs issus des minorités.
La proximité avec des personnalités noires n’a jamais été synonyme d’alliance.
– Khadijah Robinson, fondatrice de The Nile List
Des craintes pour l’avenir
Au-delà de la déception, certains fondateurs noirs s’inquiètent des conséquences concrètes de ce soutien à Trump sur leurs perspectives. Alors que 2020 et 2021 avaient été des années historiques en termes de financement pour la communauté tech noire, beaucoup craignent un retour en arrière.
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Face à ce contexte, les fondateurs noirs doivent jongler entre la nécessité de tisser des liens avec des investisseurs influents et la volonté de ne pas s’aliéner ceux qui soutiennent des candidats nuisant à leur communauté. Un équilibre délicat et un dilemme moral que certains résument ainsi : « La politique, comme l’investissement, n’a pas d’émotion. Le marché ira dans la direction de ceux qui feront au mieux pour leurs intérêts. »