La Faillite De Fluid Truck Et La Poursuite De Sa Vente Après Un Remaniement

Dans un rebondissement inattendu, la startup de location de véhicules utilitaires Fluid Truck vient de déposer le bilan, seulement deux mois après que son conseil d’administration ait évincé les co-fondateurs de leurs postes de direction. La société cherche maintenant un repreneur pour poursuivre ses activités, dans le cadre d’une procédure de faillite de type Chapter 11 aux États-Unis.

Fondée en 2016 par le frère et la sœur James Eberhard et Jenifer Snyder, Fluid Truck avait connu une croissance rapide, levant plus de 80 millions de dollars auprès d’investisseurs et se déployant dans 400 villes américaines. Mais la startup s’est vite retrouvée en difficulté financière, accumulant 20,6 millions de dollars de pertes en 2023, en raison d’une conjonction de facteurs macroéconomiques défavorables et d’une mauvaise gestion des sinistres sous la houlette d’Eberhard.

Un conseil d’administration divisé et un CEO remercié

Les déficits croissants et l’incapacité d’Eberhard à lever de nouveaux fonds ont attisé les tensions au sein du conseil d’administration, notamment avec deux actionnaires minoritaires, Bison Capital et Ingka Investments. En juillet dernier, le conseil a fini par voter le limogeage d’Eberhard et de Snyder. Scott Avila de Paladin Management a été nommé CEO par intérim pour redresser la barre, mais il a vite exploré des options de liquidation de l’entreprise.

Un repreneur providentiel mais des créanciers lésés

C’est alors que Kingbee Rentals, une agence de location de camionnettes de l’Utah, s’est manifestée pour racheter Fluid Truck. Mais ne pouvant financer seule l’opération, Kingbee s’est associée à des investisseurs existants pour consentir un prêt relais de 7 millions de dollars, le temps de boucler la transaction. Le tribunal des faillites vient d’approuver ce crédit, sachant que Fluid Truck est à court de trésorerie pour maintenir son activité.

Si cela permet de sauver l’entreprise et une partie des emplois, les petits investisseurs regroupés dans le programme Fluid Vehicle Investor Program (FVIP) risquent eux de tout perdre. Fluid Truck leur devait 12 millions de dollars, en plus de 26 millions dus à des fournisseurs. N’étant pas des créanciers privilégiés, ils seront les derniers servis. Un recours collectif a d’ailleurs été lancé par des membres FVIP floués.

Les leçons d’une croissance mal maîtrisée

Le cas Fluid Truck illustre les risques d’une hypercroissance et d’une gouvernance défaillante pour une jeune pousse, aussi prometteuse soit-elle. Malgré un modèle en apparence séduisant – le « Zipcar des utilitaires » – la startup s’est déployée trop vite sans maîtriser ses coûts ni ses processus, en réinvestissant sans compter l’argent des investisseurs.

Les dérives de son co-fondateur – dépenses inconsidérées, mauvaise gestion des sinistres – ont fini par plomber l’entreprise, sur fond de dégradation de la conjoncture économique. Pris de court, le conseil d’administration a du trancher dans le vif pour éviter la liquidation, au prix d’une violation de la confiance des petits porteurs du programme FVIP.

Il reste à espérer que le repreneur Kingbee parviendra à relancer l’activité sur des bases plus saines, en tirant les leçons des errements passés. Mais le mal est fait pour les investisseurs non sécurisés et pour l’image de la startup, qui avait suscité de grands espoirs. Un nouveau symptôme, s’il en fallait, de la « gueule de bois » qui menace aujourd’hui les licornes technologiques après les excès des années fastes.

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MondeTech.fr

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