Le vendredi 2 août 2024, la Turquie a été secouée par une interdiction soudaine d’Instagram qui a laissé des millions d’utilisateurs dans l’incapacité d’accéder à l’application. Ce black-out des réseaux sociaux a suscité de nombreuses interrogations quant aux motivations réelles du gouvernement turc derrière cette décision drastique.
Une mesure attendue dans un contexte de tensions
L’interdiction d’Instagram en Turquie survient dans un contexte de tensions croissantes entre le gouvernement et les réseaux sociaux. Fahrettin Altun, le responsable des communications turc, avait récemment accusé la plateforme d’avoir censuré des messages de condoléances concernant Ismail Haniyeh, une figure clé du Hamas, le groupe militant palestinien soutenu par la Turquie dans le conflit israélo-palestinien.
Apparemment, les actions de la plateforme n’ont pas été très bien accueillies par les autorités turques.
Selon l’Autorité des technologies de l’information et de la communication (BTK), Instagram aurait été fermé car « les délits de catalogue n’ont pas été suivis ». Une justification pour le moins vague qui ne fait qu’alimenter les spéculations.
La Turquie, coutumière des blocages de réseaux sociaux
Ce n’est pas la première fois que la Turquie s’attaque aux plateformes de médias sociaux. Depuis 2022, des centaines de milliers de noms de domaine numériques ont été bloqués dans le pays selon l’Association pour la liberté d’expression. YouTube avait été interdit de 2007 à 2010, et Instagram n’est que le dernier en date à rejoindre ce club des bannis.
Réactions des citoyens turcs et rétropédalage de la Cour constitutionnelle
L’interdiction d’Instagram a suscité un vif émoi parmi les citoyens turcs. Sur X (anciennement Twitter), le sujet est devenu une tendance mondiale. Des informations troublantes ont émergé, révélant que la Cour constitutionnelle turque avait dans un premier temps jugé cette interdiction inconstitutionnelle, la qualifiant de violation de la liberté d’expression et de la liberté de la presse.
Cependant, peu après, cette décision aurait mystérieusement disparu et l’accès au site web de la Cour constitutionnelle aurait été bloqué par la BTK. Une véritable intrigue digne d’un feuilleton qui soulève de sérieuses questions sur l’état de droit en Turquie.
Une situation encore confuse et évolutive
Si l’interdiction d’Instagram reste en vigueur pour le moment, certains utilisateurs signalent un retour progressif de l’accès à l’application, tandis que d’autres en sont toujours privés. L’histoire est mise sur pause pour l’instant, laissant planer le doute sur la prochaine étape de ce bras de fer entre le gouvernement turc et les géants des réseaux sociaux.
Cette affaire lourde de conséquences, qui avait débuté comme un simple désaccord sur le partage de photos, est révélatrice des enjeux de liberté d’expression et de régulation d’Internet dans un pays comme la Turquie. Elle soulève également des questions sur la réelle efficacité et la légitimité de lois visant à contrer la désinformation et la propagande quand celles-ci ne sont pas respectées par les autorités elles-mêmes.
À l’heure où nous écrivons ces lignes, le dénouement de ce feuilleton politico-numérique reste encore incertain. Une chose est sûre cependant : l’interdiction d’Instagram en Turquie aura mis en lumière les profondes tensions qui existent entre la volonté de contrôle du gouvernement et les aspirations de liberté des citoyens à l’ère du tout digital.