Imaginez un réseau social où l’on vous connecte non pas à ce qui est populaire, mais à ce qui est susceptible de vous intéresser. Un espace en ligne exempt de course aux likes et au nombre de followers, où l’on explore de nouvelles idées de façon fluide et originale. C’est la promesse de Maven, une plateforme lancée début 2024 par Kenneth Stanley, ancien chercheur d’OpenAI. Son secret : un algorithme d’intelligence artificielle (IA) conçu pour favoriser la sérendipité.
L’algorithme ouvert, clé de voûte de Maven
Le cœur de Maven repose sur un algorithme d’IA dit « ouvert ». Contrairement aux algorithmes actuels optimisés pour maximiser l’engagement et les revenus publicitaires, souvent en mettant en avant des contenus sensationnalistes, celui de Maven cherche à connecter chaque utilisateur avec des publications susceptibles de l’intéresser et de l’enrichir.
Concrètement, l’utilisateur sélectionne des sujets qui l’intéressent lors de son inscription, puis l’algorithme lui suggère des conversations et connexions pertinentes, parfois de façon transversale. Quelqu’un intéressé par l’urbanisme pourrait ainsi se voir proposer des discussions sur les transports en commun. Le tout sans aucun like, retweet ou bouton « follow ».
Les chambres d’écho, la toxicité, l’amplification du narcissisme et le personal branding sont devenus hors de contrôle, au point que les gens perdent leur âme et se transforment en marques.
– Kenneth Stanley, co-fondateur de Maven
Construire des connexions intéressantes plutôt qu’une audience
En supprimant la plupart des métriques qui régissent les réseaux sociaux actuels, Maven espère se débarrasser des incitations perverses qui y règnent. Plus besoin de créer du contenu racoleur pour devenir viral. L’accent est mis sur la création de connexions intéressantes entre individus et idées.
Les premiers retours des utilisateurs semblent positifs, beaucoup appréciant les interactions authentiques et la liberté de s’exprimer sans chercher à plaire aux algorithmes. Reste à voir si cette approche suffira pour faire croître la plateforme et trouver un modèle économique pérenne.
Le défi de la monétisation éthique
Avec 2 millions de dollars levés en 2023 auprès d’investisseurs comme le cofondateur de Twitter Evan Williams, Maven en est encore à ses débuts. Kenneth Stanley réfléchit à un modèle par abonnement pour préserver l’intégrité de sa vision, mais d’autres options comme la monétisation des données d’utilisation pourraient s’avérer tentantes.
Les données de Maven sur « ce qui est intéressant » ont en effet une grande valeur potentielle pour l’entraînement de modèles d’IA. Stanley assure cependant que ce n’est pas son objectif, et qu’il compte étudier attentivement les implications éthiques d’un tel partage s’il devait avoir lieu.
L’idée d’un réseau de sérendipité m’a donné le sentiment de pouvoir contribuer à rapprocher les gens plutôt que les éloigner.
– Kenneth Stanley, co-fondateur de Maven
L’avenir des réseaux sociaux en question
Maven soulève des questions fondamentales sur le rôle et le fonctionnement des réseaux sociaux. Pouvons-nous créer des espaces en ligne favorisant des connexions enrichissantes sans tomber dans les travers des plateformes actuelles ? L’IA peut-elle être utilisée pour servir les intérêts des utilisateurs plutôt que ceux des annonceurs ?
Si le pari de Maven est osé, il ouvre la voie à de nouvelles façons d’envisager nos interactions en ligne. Dans un contexte où la toxicité des réseaux sociaux est de plus en plus pointée du doigt, cette quête d’un modèle alternatif semble plus que jamais nécessaire.