L’enthousiasme qui régnait en début d’année 2025 pour un retour en force des fusions-acquisitions dans le secteur technologique semble s’être évaporé en quelques semaines. Une question taraude les entrepreneurs et investisseurs : comment un marché prometteur peut-il basculer si vite dans l’incertitude ? La réponse réside dans un cocktail explosif : des tariffs douaniers imprévisibles, des valorisations fluctuantes et une prudence accrue des grands acteurs tech. Cet article explore pourquoi le regain espéré des deals tech pourrait être compromis et ce que cela signifie pour les startups et les investisseurs.

Un Début D’année Prometteur, Vite Douché

En janvier 2025, le marché des fusions-acquisitions semblait enfin sortir de l’ornière. Après des années de disette, marquées par un ralentissement des levées de fonds et des sorties, les investisseurs retrouvaient le sourire. Les valorisations des startups late-stage commençaient à se redresser, portées par une poignée de transactions emblématiques. Par exemple, CoreWeave a déboursé 1,7 milliard de dollars pour acquérir Weights & Biases, tandis que ServiceNow a mis 2,9 milliards sur la table pour Moveworks. Google, de son côté, a frappé fort avec l’achat de la startup de cybersécurité Wiz pour 32 milliards de dollars.

Ces deals, parmi d’autres, laissaient présager un retour en force du marché. Selon les données de PitchBook, pas moins de 205 acquisitions de startups américaines ont été enregistrées au premier trimestre 2025. L’administration Trump, perçue comme favorable aux fusions-acquisitions contrairement à celle de Biden, qui avait bloqué plusieurs deals pour des raisons antitrust, semblait ouvrir une fenêtre d’opportunité.

« En début d’année, l’optimisme était palpable. Tout le monde pensait que 2025 serait l’année du rebond pour les deals tech. »

– Stellar Tucker, Managing Director chez Truist Securities

L’Ombre des Tarifs Douaniers

Tout a basculé le 2 avril 2025, surnommé le « Liberation Day ». Ce jour-là, l’administration Trump a annoncé des tarifs douaniers massifs visant presque tous les partenaires commerciaux majeurs des États-Unis. Les entreprises technologiques, déjà sensibles aux fluctuations économiques, ont vu leurs actions plonger. Ce coup de massue a stoppé net l’élan du premier trimestre.

Une semaine plus tard, un sursis de 90 jours sur ces tarifs a été accordé, plongeant le marché dans une zone grise. Cette incertitude paralyse les décideurs. Les grandes entreprises technologiques, principales actrices des acquisitions, hésitent à engager des fonds dans un climat aussi instable.

Les raisons de cette frilosité sont multiples :

• Chute des valorisations : Les actions des grandes entreprises tech, comme Apple ou Microsoft, ont subi des pertes significatives, réduisant leur capacité à financer des acquisitions.
• Prudence stratégique : Les entreprises préfèrent conserver leurs liquidités ou procéder à des rachats d’actions plutôt que de risquer des acquisitions coûteuses.
• Chaînes d’approvisionnement menacées : Les tarifs pourraient perturber les supply chains, notamment pour les entreprises dépendantes de composants importés.

Valorisations : Le Casse-Tête Persistant

Un autre obstacle majeur réside dans l’incertitude autour des valorisations des startups. Depuis 2021, les valorisations stratosphériques ont laissé place à une correction brutale. Mais à combien vaut une startup aujourd’hui ? La réponse reste floue. Les acheteurs et vendeurs peinent à s’accorder sur un prix juste, surtout dans un marché volatil.

« Attendre quelques jours pourrait changer complètement la donne en termes de valorisation. Cela crée une immense incertitude. »

– Ronan Kennedy, Responsable de l’équipe Capital Advisory chez B Capital

Pour les startups en quête de liquidités, cette situation est particulièrement problématique. Celles qui espéraient une levée de fonds ou une acquisition à un prix avantageux se retrouvent face à des offres décevantes. Certaines doivent même envisager des down rounds (levées à une valorisation inférieure) ou des acquisitions à rabais.

Des Deals Malgré Tout ?

Malgré ce tableau sombre, le marché des fusions-acquisitions n’est pas totalement à l’arrêt. Certains secteurs, comme l’intelligence artificielle, continuent d’attirer les investisseurs. Les entreprises bien capitalisées, à l’image d’OpenAI, qui a levé 40 milliards de dollars en mars 2025, sont en position de force pour acquérir des startups prometteuses. Une rumeur persistante évoque, par exemple, l’acquisition de Windsurf, une startup spécialisée dans le codage assisté par IA, pour 3 milliards de dollars.

Les startups en difficulté, incapables de lever des fonds, pourraient également alimenter le marché. Pour elles, une acquisition, même à un prix réduit, peut être la seule issue viable. Comme le souligne Thomas Earnest, partenaire chez Mintz :

« Les startups qui ne peuvent pas lever de fonds devront se résoudre à des acquisitions à des valorisations plus basses. »

– Thomas Earnest, Partenaire chez Mintz

Ces deals, bien que moins glamour, maintiennent une certaine activité. Mais ils reflètent une réalité cruelle : les opportunités de sorties lucratives pour les fondateurs et les investisseurs se raréfient.

Un Horizon Incertain Pour 2025

À mesure que le deuxième trimestre 2025 avance, les perspectives s’assombrissent. La pause de 90 jours sur les tarifs expire début juillet, et l’issue reste incertaine. Si les tarifs sont rétablis, ils pourraient durablement freiner l’activité. Même en cas de nouveaux accords commerciaux, la stabilité ne reviendra probablement pas avant l’été, une période traditionnellement calme pour les fusions-acquisitions.

Pour les startups, les défis sont immenses :

• Concurrence accrue : Les startups doivent se démarquer dans un marché saturé, où les acheteurs sont plus sélectifs.
• Pressions financières : Les entreprises à court de liquidités risquent de devoir accepter des conditions défavorables.
• Incertitude géopolitique : Les tensions commerciales internationales compliquent les prévisions à long terme.

Pour les investisseurs en capital-risque, la situation est tout aussi préoccupante. Sans sorties significatives, les fonds peinent à retourner du capital à leurs souscripteurs, ce qui limite leur capacité à investir dans de nouvelles opportunités.

Comment Naviguer Dans Cette Tempête ?

Face à cette instabilité, les entrepreneurs et investisseurs doivent adopter des stratégies pragmatiques. Voici quelques pistes :

• Renforcer la résilience : Les startups doivent optimiser leurs opérations pour prolonger leur runway, en réduisant les coûts superflus.
• Explorer des niches : Les secteurs comme l’IA ou la cybersécurité restent attractifs pour les acquéreurs, même en période de crise.
• Anticiper les scénarios : Les entreprises doivent modéliser différents scénarios économiques pour être prêtes à pivoter rapidement.

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Un Équilibre Précaire

Le marché des fusions-acquisitions tech en 2025 illustre un paradoxe : alors que les opportunités d’innovation n’ont jamais été aussi nombreuses, l’incertitude économique freine les ambitions. Les tarifs douaniers, les valorisations instables et la prudence des acheteurs créent un environnement où seuls les plus agiles et les mieux préparés prospéreront.

Si le rebond tant attendu semble compromis, tout n’est pas perdu. Les entreprises qui sauront s’adapter, en tirant parti des secteurs porteurs comme l’intelligence artificielle ou en optimisant leur stratégie, auront une chance de tirer leur épingle du jeu. Pour les autres, 2025 risque d’être une année de survie plus que de croissance.

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