Scandale BluSmart : Enquête Sur Les Prêts EVs Détournés

Imaginez une startup prometteuse, portée par l’élan de la mobilité verte, qui ambitionne de rivaliser avec Uber dans l’un des marchés les plus dynamiques du monde : l’Inde. Puis, du jour au lendemain, elle se retrouve au cœur d’un scandale financier retentissant, accusée de détourner des fonds destinés à révolutionner le transport. C’est l’histoire de BluSmart, une entreprise indienne de covoiturage tout-électrique, aujourd’hui sous le feu des projecteurs à cause d’une enquête de la Securities and Exchange Board of India (SEBI). Dans cet article, nous plongeons dans les détails de cette affaire, ses implications pour le secteur des startups et les leçons à tirer pour les entrepreneurs et investisseurs. Préparez-vous à découvrir comment une vision audacieuse peut être ébranlée par des failles de gouvernance.

Une Ascension Fulgarante Freinée par la Crise

BluSmart, fondée en 2018 sous le nom de Gensol Mobility, s’est rapidement imposée comme un acteur clé de la mobilité électrique en Inde. Avec une flotte de plus de 6 000 véhicules électriques (EVs) en 2023, principalement des Tata Tigor et des MG Motor ZS SUVs, l’entreprise opérait dans les métropoles de Delhi-NCR, Bengaluru et Mumbai. Son ambition ? Offrir une alternative durable à Uber et Ola, en misant sur des véhicules propres et un service premium. En janvier 2024, BluSmart levait 25 millions de dollars auprès du fonds suisse ResponsAbility pour étendre son réseau de bornes de recharge. Des investisseurs prestigieux, comme BP Ventures et Mayfield India Fund, avaient déjà injecté plus de 486 millions de dollars dans la startup, selon TechCrunch. Pourtant, ce succès apparent cachait des fissures profondes.

Le scandale a éclaté le 15 avril 2025, lorsque la SEBI a lancé une enquête sur Gensol Engineering, une entreprise cotée en bourse qui partage ses cofondateurs avec BluSmart : les frères Anmol et Puneet Singh Jaggi. L’organisme de régulation a accusé les deux entrepreneurs d’avoir détourné une partie des prêts destinés à l’achat de véhicules électriques pour des dépenses personnelles, notamment l’acquisition d’un luxueux appartement à Gurugram, dans le complexe The Camellias. Cette révélation a non seulement terni l’image de BluSmart, mais a aussi provoqué une chute spectaculaire de l’action de Gensol, qui a perdu plus de 83 % de sa valeur cette année.

Les promoteurs géraient une entreprise publique cotée comme s’il s’agissait d’une firme personnelle.

– SEBI, dans son ordonnance intérimaire

Les Détails de l’Enquête : Un Détournement de Fonds Massif

Selon l’ordonnance de la SEBI, Gensol Engineering a obtenu des prêts totalisant 9,78 milliards de roupies (environ 114 millions de dollars) auprès de deux institutions publiques, l’Indian Renewable Energy Development Agency (IREDA) et la Power Finance Corporation (PFC). De cette somme, 6,63 milliards de roupies étaient destinés à l’achat de 6 400 véhicules électriques pour les louer à BluSmart. Cependant, l’enquête a révélé que seuls 4 704 véhicules ont été acquis pour 5,68 milliards de roupies, laissant un écart significatif. Où est passé le reste de l’argent ?

La SEBI a découvert que des fonds ont été détournés via des transactions complexes pour financer des dépenses sans lien avec l’objectif initial des prêts. Parmi les abus signalés :

  • Achat d’un appartement de luxe à The Camellias, d’une valeur estimée à 43 crores de roupies.
  • Dépenses personnelles, incluant un set de golf américain à 26 lakhs de roupies.
  • Transferts de fonds vers des entités privées liées aux promoteurs et à leurs proches.

Ces révélations ont conduit la SEBI à interdire aux frères Jaggi de participer au marché des valeurs mobilières et d’occuper des postes de direction dans Gensol, en attendant les conclusions de l’enquête. De plus, un audit forensique a été ordonné pour examiner les finances de l’entreprise et de ses entités liées.

Les Répercussions sur BluSmart : Une Startup en Péril

Le scandale n’a pas épargné BluSmart, dont les opérations dépendaient fortement de Gensol pour la location de sa flotte électrique. Dès le 16 avril 2025, la startup a suspendu ses services dans plusieurs villes, notamment Delhi-NCR, Bengaluru et Mumbai. Les utilisateurs ont rapporté l’impossibilité de réserver des trajets via l’application, tandis que des chauffeurs se sont retrouvés sans travail du jour au lendemain. Cette interruption brutale a mis en lumière les fragilités financières de BluSmart, aggravées par une consommation de liquidités élevée et l’absence de nouveaux financements.

En 2024, BluSmart avait tenté de lever 100 millions de dollars, sans succès. Une tentative plus récente de réunir 50 millions de dollars a également échoué, en partie à cause des doutes soulevés par les problèmes de Gensol. Selon le journal indien Economic Times, BluSmart envisagerait désormais de pivoter pour devenir un partenaire de flotte pour Uber, son ancien rival. Ce changement stratégique marquerait un recul significatif par rapport à ses ambitions initiales de dominer le marché du covoiturage électrique.

Nous coopérons pleinement avec le régulateur et sommes en train de rassembler tous les documents nécessaires pour clarifier la situation.

– Anmol Singh Jaggi, cofondateur de BluSmart, à TechCrunch

Une Leçon de Gouvernance pour les Startups

Le scandale BluSmart-Gensol met en lumière une problématique cruciale pour les startups : l’importance de la gouvernance d’entreprise. En Inde, où l’écosystème des startups est en pleine effervescence, les jeunes entreprises attirent des capitaux massifs, mais souvent au détriment de contrôles internes rigoureux. L’ordonnance de la SEBI souligne un manque flagrant de transparence dans la gestion de Gensol, accusant les promoteurs d’avoir traité l’entreprise comme un « coffre-fort personnel ».

Pour les entrepreneurs, cette affaire rappelle que la confiance des investisseurs repose sur des pratiques éthiques et une gestion responsable des fonds. Voici quelques enseignements clés :

  • Transparence financière : Les startups doivent documenter clairement l’utilisation des fonds, surtout lorsqu’il s’agit de prêts publics.
  • Indépendance des entités : Les relations entre entreprises liées, comme Gensol et BluSmart, doivent être strictement encadrées.
  • Audits réguliers : Des contrôles externes peuvent prévenir les dérives avant qu’elles ne deviennent des scandales.

L’Impact sur l’Écosystème de la Mobilité Électrique

Le scandale a des répercussions bien au-delà de BluSmart et Gensol. L’Inde, qui ambitionne de devenir un leader mondial de la mobilité électrique, repose sur des entreprises innovantes pour atteindre ses objectifs de réduction des émissions. Les déboires de BluSmart risquent de refroidir les investisseurs, déjà prudents face aux défis du secteur, comme les coûts élevés des infrastructures de recharge et la concurrence acharnée.

Pourtant, des opportunités subsistent. Des entreprises comme Ola Electric continuent d’investir massivement dans les EVs, tandis que le gouvernement indien soutient activement le secteur via des subventions et des incitations fiscales. Le défi pour les startups sera de restaurer la confiance en démontrant une gestion irréprochable et des modèles économiques viables.

Quel Avenir pour BluSmart et Gensol ?

L’avenir de BluSmart reste incertain. La suspension de ses services et les difficultés financières pourraient pousser l’entreprise à se réinventer, peut-être en se concentrant sur des partenariats stratégiques plutôt que sur une concurrence frontale avec Uber. Quant à Gensol, l’audit forensique en cours déterminera l’ampleur des irrégularités et les sanctions définitives. Les frères Jaggi, pour leur part, devront répondre de leurs actes devant les autorités et les investisseurs.

Ce scandale, bien que dramatique, pourrait servir de catalyseur pour des réformes dans l’écosystème des startups indiennes. En renforçant la régulation et en promouvant des pratiques de gouvernance solides, l’Inde peut protéger son statut de hub technologique tout en continuant à innover dans des secteurs clés comme la mobilité verte.

Conclusion : Une Alerte pour les Entrepreneurs

L’affaire BluSmart-Gensol est un rappel brutal que le succès d’une startup ne se mesure pas seulement à ses levées de fonds ou à sa croissance rapide, mais aussi à la solidité de ses fondations éthiques. Pour les entrepreneurs et investisseurs, cette histoire souligne l’importance de la responsabilité financière et de la transparence. Alors que l’Inde continue de s’imposer comme un leader de l’innovation, des leçons tirées de ce scandale pourraient façonner un avenir plus durable pour les startups technologiques.

Que pensez-vous de cette affaire ? Les startups doivent-elles privilégier la croissance à tout prix, ou investir dans une gouvernance irréprochable dès le départ ? Partagez vos réflexions dans les commentaires !

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