Depuis plusieurs années, l’annonce par Google de la suppression des cookies tiers sur son navigateur Chrome laissait présager une révolution pour la confidentialité en ligne. Mais coup de théâtre en 2023, puis en juillet 2024 : le géant de Mountain View revient sur sa décision. Quelles sont les motivations derrière ce revirement ? Quelles alternatives sont proposées ? Décryptage de ce choix stratégique aux implications majeures pour l’écosystème publicitaire numérique.
Remise en contexte : la promesse initiale de Google
Les cookies tiers, ces petits fichiers qui permettent de suivre la navigation des internautes sur différents sites web, sont au cœur du ciblage publicitaire en ligne. Bien qu’avantageux pour les annonceurs, leur utilisation soulève d’importants enjeux en matière de respect de la vie privée. Face au renforcement des réglementations comme le RGPD en Europe, Google avait annoncé la fin des cookies tiers sur Chrome, initialement prévue pour 2022 puis repoussée à 2024 et 2025.
Privacy Sandbox : une alternative ambitieuse mais controversée
Pour remplacer les cookies tiers, Google misait sur Privacy Sandbox, un projet visant à développer de nouvelles technologies de ciblage publicitaire respectueuses de la confidentialité. Malgré les tests et échanges avec l’industrie, cette initiative s’est heurtée à de sérieux obstacles :
- L’impact économique redouté par les éditeurs et annonceurs, craignant une baisse drastique de leurs revenus publicitaires.
- Les réserves des régulateurs, suspectant un possible renforcement de la position dominante de Google sur le marché de la publicité en ligne.
Le choix du libre arbitre pour les utilisateurs
Plutôt que d’imposer la fin des cookies tiers, Google opte finalement pour donner le choix aux utilisateurs. Une nouvelle expérience sera introduite sur Chrome, permettant à chacun de décider s’il consent ou non au suivi de sa navigation à des fins publicitaires, avec la possibilité de modifier ce choix à tout moment. Bien que les modalités précises de recueil de ce consentement restent à définir, l’Alliance Digitale, association professionnelle française, s’interroge :
Nous rappelons qu’au sein de l’Union européenne, sur la base du RGPD et de la directive ePrivacy, le consentement de l’utilisateur est déjà requis pour l’utilisation de cookies à des fins de publicité personnalisée.
Alliance Digitale
En parallèle, Google poursuivra le développement des APIs Privacy Sandbox comme alternatives privacy-friendly et renforcera les protections, notamment celle des adresses IP en mode navigation privée sur Chrome.
Un revirement diversement apprécié par l’écosystème
L’abandon de la suppression des cookies tiers par Google suscite des réactions contrastées. Si certains acteurs comme Criteo y voient une opportunité de poursuivre leur activité tout en explorant des solutions alternatives, des associations de défense de la vie privée expriment leur déception. Quant aux régulateurs, ils restent en alerte.
Quel avenir pour une publicité en ligne plus respectueuse de la vie privée ?
En renonçant à supprimer définitivement les cookies tiers, Google tente de trouver un équilibre entre les intérêts de l’industrie publicitaire et la protection de la vie privée des internautes. Si le libre choix laissé aux utilisateurs semble de prime abord une avancée, tout dépendra de la clarté et de l’adoption massive ou non de ce nouveau mécanisme de consentement. Une chose est sûre : le débat sur la conciliation entre ciblage publicitaire et confidentialité des données est loin d’être clos. L’avenir nous dira si cette décision de Google contribuera réellement à façonner un Internet plus respectueux de la vie privée.