Equator Leve 55M$ Pour le Climat Tech en Afrique

Et si l’avenir de la technologie verte se jouait en Afrique ? Alors que le continent ne représente que 3 % des émissions mondiales de CO2 liées à l’énergie, il subit de plein fouet les conséquences du changement climatique. Dans ce contexte, une nouvelle prometteuse émerge : la firme de capital-risque TechCrunch rapporte qu’Equator, un fonds basé en Afrique, vient de lever 55 millions de dollars pour soutenir les startups du climat tech. Une initiative qui pourrait transformer la donne en attirant des capitaux privés là où les financements publics se raréfient. Cet article plonge dans cette actualité brûlante, explore ses implications pour les entrepreneurs et décrypte pourquoi ce mouvement redéfinit les règles du jeu dans le monde des startups africaines.

Un Fonds pour Combler un Vide Crucial

En Afrique, les startups spécialisées dans les technologies climatiques font face à un défi de taille : un accès limité aux financements. Contrairement aux marchés développés, où les gouvernements soutiennent activement les innovations vertes, les entrepreneurs africains dépendent souvent des institutions de financement du développement (DFI), des fondations ou des dotations. Mais avec la réduction des budgets d’aide internationale, ces sources se tarissent, laissant un vide que peu d’acteurs osent combler. C’est là qu’Equator entre en scène. Avec son fonds de 55 millions de dollars, la firme ambitionne de soutenir les entreprises en phase précoce, un stade souvent négligé mais essentiel pour poser les bases d’une croissance durable.

Leur stratégie ? Investir dans **15 à 18 startups**, avec des tickets compris entre 750 000 et 1 million de dollars pour les tours de Seed, et jusqu’à 2 millions pour les Series A. Mais Equator ne se contente pas d’apporter des fonds. La société veut aussi accompagner les fondateurs sur des aspects clés comme la structuration économique, la gouvernance ou encore l’expansion régionale. Une approche qui pourrait faire la différence dans un écosystème où les ressources techniques et stratégiques manquent souvent.

Pourquoi le Climat Tech en Afrique ?

Vous vous demandez peut-être pourquoi miser sur le climat tech en Afrique alors que le continent émet si peu de CO2 ? La réponse tient en deux mots : impact disproportionné. Les sécheresses, les inondations et les vagues de chaleur frappent durement les populations africaines, aggravant les défis économiques et sociaux. Pourtant, c’est aussi une terre d’opportunités. Les solutions technologiques qui émergent ici – dans l’énergie, l’agriculture ou la mobilité – ne se contentent pas de répondre à des besoins locaux ; elles ont le potentiel de s’exporter à l’échelle mondiale.

« Nous sommes plus que jamais nécessaires pour investir dans des technologies et des entreprises scalables qui s’attaquent aux défis climatiques fondamentaux. »

– Nijhad Jamal, Managing Partner d’Equator

Cette vision résonne avec une tendance de fond : les investisseurs ne cherchent plus seulement à “faire le bien”. Ils veulent des modèles économiques viables, capables de générer des revenus tout en résolvant des problèmes concrets. Equator l’a bien compris et cible des secteurs porteurs comme les véhicules électriques moins coûteux que leurs équivalents à carburant, les assurances climatiques adaptées aux aléas extrêmes ou encore les outils d’optimisation logistique basés sur l’**intelligence artificielle**.

Une Base d’Investisseurs Paradoxale

Si Equator veut réduire la dépendance des startups aux financements publics, son propre fonds repose encore sur des acteurs traditionnels. Parmi ses soutiens, on trouve des DFI comme British International Investment (BII), Proparco ou encore l’IFC, ainsi que des fondations prestigieuses telles que la Global Energy Alliance for People and Planet (financée par IKEA, Rockefeller et Jeff Bezos). Ce paradoxe illustre une réalité : le passage vers une économie portée par le privé est progressif. Equator se positionne comme un pont, mobilisant ces institutions pour attirer ensuite des investisseurs plus commerciaux.

Cette stratégie semble porter ses fruits. Selon Nijhad Jamal, jusqu’à récemment, Equator affichait un taux de succès de 100 % pour impliquer ses investisseurs directement dans les entreprises soutenues. Une prouesse qui renforce son rôle unique dans l’écosystème africain, où il est souvent le seul acteur local à la table des négociations.

Des Startups Qui Redéfinissent le Marché

Le portefeuille d’Equator donne un aperçu des innovations qui émergent en Afrique. Prenons quelques exemples concrets :

  • Roam Electric : développe des véhicules électriques abordables, une alternative aux modèles à essence coûteux en carburant.
  • Ibisa : propose des solutions d’assurance climatique basées sur des données précises, protégeant contre les catastrophes naturelles.
  • Leta : optimise la logistique des entreprises grâce à l’IA, réduisant les coûts et l’empreinte carbone.

Ces entreprises incarnent un tournant. Là où les premières générations de startups cleantech, comme Sun King ou M-KOPA, ont misé sur des levées de fonds massives en vue d’introductions en bourse, cette nouvelle vague privilégie une utilisation plus efficace du capital. Résultat ? Elles deviennent des cibles attractives pour des rachats, avec des sorties potentielles autour de 100 millions de dollars, loin des IPO à un milliard, mais tout aussi lucratives pour les investisseurs.

Un Écosystème en Pleine Mutation

Le marché du climat tech africain n’est plus celui d’il y a quelques années. En 2023, ce secteur était le deuxième plus attractif pour les investisseurs en capital-risque sur le continent, juste derrière la fintech. Mais depuis, les priorités ont évolué. Si l’impact environnemental reste central, les discussions se concentrent désormais sur les ventes et la **rentabilité**. Les fondateurs doivent prouver que leurs solutions apportent une valeur économique tangible aux clients, qu’il s’agisse d’entreprises ou de particuliers disposant d’un pouvoir d’achat.

Cette mutation reflète une maturité croissante. Les startups d’aujourd’hui opèrent dans un environnement plus structuré, avec des outils et des données qui leur permettent d’aller plus vite et de dépenser moins. Un atout précieux dans un contexte où les investisseurs scrutent les **unit economics** (économies d’unité) et les chemins vers la profitabilité.

Fusions et Acquisitions : La Nouvelle Donne

Le climat tech africain commence à voir des mouvements de consolidation. Des fusions comme celle entre SteamaCo (soutenue par Equator) et Shyft Power Solutions, ou encore l’acquisition de PEG Africa par BBOXX en 2022, montrent que le secteur attire l’attention. Pour Nijhad Jamal, ces opérations sont un signe encourageant : les startups deviennent des cibles viables pour des sorties commerciales, même si elles restent plus modestes que les méga-deals d’autrefois.

Mais pour maximiser ces opportunités, la structuration du capital est cruciale. En 2024, le climat tech a attiré le plus de financements par dette sur le continent. Equator insiste sur l’importance de mélanger equity, dette et instruments financiers hybrides pour éviter une dilution excessive des parts des fondateurs et des investisseurs. Une approche qui pourrait ouvrir la voie à des exits plus fréquents et accessibles.

Les Hommes Derrière la Vision

À la tête d’Equator, on trouve Nijhad Jamal et Morgan DeFoort, deux profils complémentaires. Jamal, ancien de BlackRock et d’Acumen Fund, apporte une expertise pointue en investissement d’impact et en technologies propres. Il a notamment fondé Moja Capital, un véhicule personnel qui préfigurait la stratégie d’Equator. DeFoort, quant à lui, complète cette vision avec une approche opérationnelle et technique. Ensemble, ils ont déjà soutenu des pépites comme SunCulture (énergie solaire hors réseau au Kenya) ou Apollo Agriculture (agritech backed by SoftBank).

Leur ambition dépasse le simple financement : ils veulent construire un écosystème où les startups africaines attirent des capitaux privés globaux, réduisant ainsi leur dépendance aux aides extérieures. Une mission audacieuse, mais qui pourrait redéfinir le paysage entrepreneurial du continent.

Et Après ? Les Défis et Opportunités à Venir

Avec ce fonds de 55 millions de dollars, Equator pose une première pierre. Mais les défis restent nombreux. Comment convaincre davantage d’investisseurs privés de parier sur un marché perçu comme risqué ? Comment s’assurer que les startups atteignent une échelle suffisante pour peser face aux géants mondiaux ? Et surtout, comment transformer les contraintes climatiques en opportunités économiques pérennes ?

Pour y parvenir, Equator mise sur trois leviers :

  • Soutien technique : accompagner les fondateurs sur les aspects opérationnels et stratégiques.
  • Mobilisation des co-investisseurs : impliquer ses partenaires pour démultiplier les financements.
  • Innovation financière : diversifier les outils de financement pour optimiser les retours.

Si cette stratégie réussit, elle pourrait non seulement booster les startups africaines, mais aussi inspirer d’autres régions confrontées à des défis similaires. À l’heure où la technologie et la durabilité convergent, l’Afrique pourrait bien devenir un laboratoire d’innovation à suivre de près.

Une Leçon pour les Entrepreneurs Tech

Que retenir de cette initiative pour les entrepreneurs, qu’ils soient en Afrique ou ailleurs ? D’abord, que l’impact ne suffit plus : il faut démontrer une valeur économique claire. Ensuite, que la structuration du capital est aussi importante que l’idée elle-même. Enfin, que les partenariats stratégiques – avec des fonds comme Equator ou des co-investisseurs – peuvent faire la différence entre une belle idée et une entreprise scalable.

Pour les lecteurs de TechCrunch, cette actualité est un signal fort : le climat tech africain n’est plus une niche philanthropique, mais un secteur en pleine effervescence, prêt à attirer les regards des investisseurs avertis. Et vous, parieriez-vous sur cette révolution verte ?

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