Jon McNeill : Insights sur le Robotaxi de Tesla et l’Échec des Startups de Véhicules Électriques

Dans une récente présentation au World Business Forum, Jon McNeill, ancien cadre dirigeant chez Tesla et Lyft et actuel PDG de DVx Ventures, a partagé ses réflexions sur ce qu’il appelle la « méthode d’innovation Tesla » basée sur une simplification radicale. Nous avons eu l’opportunité de nous entretenir avec lui sur les objectifs d’automatisation de Tesla, son nouveau robotaxi et les défis auxquels font face les startups de véhicules électriques.

L’automatisation, une priorité de longue date chez Tesla

Selon Jon McNeill, l’automatisation est un axe majeur chez Tesla depuis près d’une décennie, bien avant le lancement d’Autopilot en 2015, son système avancé d’assistance à la conduite capable d’effectuer certaines tâches de conduite de façon autonome.

C’était un sujet de discussion chaque semaine, voire chaque jour.

– Jon McNeill

C’est en partie pour cela que la présentation très attendue du robotaxi Tesla plus tôt ce mois-ci a laissé McNeill, comme beaucoup d’autres, sur sa faim. Alors que des concurrents comme Waymo et Cruise sont déjà au niveau 4 d’autonomie (le véhicule peut conduire seul sous certaines conditions), Tesla reste actuellement au niveau 2 (assistance à la conduite avec supervision humaine constante). McNeill s’attendait à ce qu’Elon Musk dévoile des avancées majeures pour passer du niveau 2 au niveau 4, mais seuls 20 prototypes de robotaxi ont été présentés.

L’approche « vision uniquement » de Tesla en question

Tesla a fait le choix de poursuivre une approche de conduite autonome basée uniquement sur les caméras, sans utiliser de lidar ou de radar. Si cette stratégie permet de simplifier l’architecture des capteurs, elle implique en contrepartie un important travail en aval pour entraîner les réseaux de neurones nécessaires à une conduite autonome fiable. Tesla développe pour cela Dojo, un superordinateur dont la réussite n’est pas garantie de l’aveu même d’Elon Musk.

Jon McNeill exprime ses doutes quant à cette approche « vision uniquement ». Si l’être humain peut conduire avec seulement deux yeux, notre vision seule n’est pas toujours suffisante face à des conditions dégradées (neige, brouillard, éblouissement, obscurité…). Le lidar permet de surmonter ces limitations. Selon McNeill, lorsque des vies sont en jeu, il ne faut pas lésiner sur la sécurité. Si certains affirment que la vision seule peut suffire, lui n’en est pas convaincu au vu des 40 000 morts sur les routes chaque année.

Tesla adoptera-t-il le lidar ?

Tesla défend son approche basée sur la vision depuis des années, sans succès pour l’instant. McNeill estime que d’un point de vue financier, l’adoption du lidar ne poserait pas de problème majeur à Tesla vu la baisse des coûts de cette technologie. En revanche, d’un point de vue réputationnel, cela pourrait être plus délicat. Mais Tesla a déjà prouvé par le passé qu’il n’avait pas peur de revenir sur ses promesses ou de frustrer ses clients si nécessaire, comme lorsqu’Elon Musk avait affirmé en 2019 que les Tesla de l’époque seraient capables de conduite autonome complète une fois la fonctionnalité disponible, promesse qu’il a dû revoir depuis.

Pourquoi les startups de véhicules électriques échouent

Fisker en faillite, Rivian perdant 30 000$ par voiture produite, Canoo changeant constamment de modèle économique… Le constat est clair : construire une voiture à partir de zéro est un défi colossal. Faut-il un leader aussi « fou » qu’Elon Musk pour réussir ?

Je pense qu’il faut effectivement un leader fou mais efficace pour traverser l’épreuve du feu que représente la création d’un constructeur automobile. C’est difficile à décrire à quel point il est complexe d’assembler 10 000 pièces venant de 72 pays pour fabriquer une voiture, puis d’intégrer le logiciel pour la faire fonctionner. La production de masse, c’est vraiment le plus dur.

– Jon McNeill

McNeill souligne qu’il est facile de produire un prototype, mais extrêmement difficile d’industrialiser à grande échelle. C’est là que l’industrie automobile est impitoyable, même pour les acteurs établis comme Stellantis ou Volkswagen qui peinent face à des coûts fixes très élevés. Si le produit n’est pas au point et ne se vend pas, c’est sans merci.

En résumé, Jon McNeill nous livre un éclairage précieux sur les coulisses de la stratégie d’automatisation de Tesla, questionne certains choix technologiques comme l’approche « vision uniquement » et nous rappelle l’extrême complexité du défi que doivent relever les startups automobiles. Si la révolution des véhicules électriques et autonomes est en marche, le chemin vers un robotaxi Tesla commercialisé à grande échelle semble encore long et semé d’embûches.

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