Les géants de la tech sont une nouvelle fois dans le viseur des régulateurs européens. Selon les conclusions préliminaires d’une enquête menée par la Commission européenne, le modèle « payer ou consentir » proposé par Meta à ses utilisateurs de Facebook et Instagram en Europe ne respecte pas les règles de concurrence établies par le Digital Markets Act (DMA).
Un choix binaire qui force le consentement
La Commission a souligné dans un communiqué de presse que le choix binaire offert par Meta « oblige les utilisateurs à consentir à la combinaison de leurs données personnelles et ne leur fournit pas une version moins personnalisée mais équivalente des réseaux sociaux de Meta ».
En effet, Meta demande actuellement à ses utilisateurs soit d’accepter d’être tracés pour continuer à recevoir de la publicité ciblée, soit de payer près de 13€ par mois (par compte) pour accéder à des versions sans publicité des services. Un choix que la Commission juge déloyal.
Des sanctions qui pourraient coûter cher
Ne pas se conformer au règlement sur la contestabilité des marchés, qui s’applique à Meta et à d’autres « gatekeepers » depuis le 7 mars, pourrait s’avérer extrêmement coûteux pour le géant de l’adtech. Les sanctions pour les infractions confirmées peuvent atteindre jusqu’à 10% du chiffre d’affaires annuel mondial, et même 20% en cas de récidive.
Plus important encore, Meta pourrait finalement être contraint d’abandonner un modèle économique qui exige des utilisateurs qu’ils acceptent la publicité de surveillance comme « prix » d’entrée pour utiliser ses réseaux sociaux.
Rééquilibrer les forces en présence
L’objectif de l’UE avec le DMA est de rééquilibrer les forces en ciblant les différents avantages que les gatekeepers peuvent exploiter grâce à leur position dominante.
Dans le cas de Meta, la Commission pense que la position dominante de l’entreprise dans les réseaux sociaux lui permet d’extraire plus de données des utilisateurs pour les profiler, ce qui confère à son activité publicitaire un avantage déloyal par rapport à ses concurrents. Pour rétablir l’équilibre, la CE a introduit dans le DMA l’obligation pour les gatekeepers d’obtenir l’autorisation des personnes avant de pouvoir les tracer à des fins publicitaires.
Un choix libre et équitable pour refuser le tracking
L’argument de la Commission contre Meta est que le géant de l’adtech ne fournit pas aux gens un choix libre et équitable pour refuser le tracking.
Lors d’un briefing avec des journalistes, des responsables de la Commission ont souligné que tant que les services de réseautage social de Meta sont gratuits, les versions équivalentes qu’elle propose aux utilisateurs qui ne souhaitent pas consentir au tracking doivent également être gratuites.
« Pour assurer la conformité au DMA, les utilisateurs qui ne consentent pas devraient quand même avoir accès à un service équivalent qui utilise moins de données personnelles, dans ce cas pour la personnalisation de la publicité. »
La Commission européenne
La publicité contextuelle comme alternative ?
Les officiels de l’UE ont souligné que Meta pourrait proposer un service alternatif avec des publicités qui ne reposent sur aucune donnée personnelle pour le ciblage, comme la publicité contextuelle.
Meta n’a d’ailleurs jamais expliqué pourquoi il n’avait pas offert aux utilisateurs une option gratuite de publicité contextuelle. Un choix que la société pourrait être contrainte de fournir dans les mois à venir…
Les prochaines étapes
L’enquête de l’UE n’est pas encore terminée et Meta aura la possibilité de répondre officiellement aux conclusions préliminaires. Mais la fenêtre de tir est limitée : le bloc s’est fixé un délai de 12 mois pour achever l’enquête, ce qui suggère qu’il doit terminer le travail au plus tard en mars 2025.
- Meta devra fournir une alternative gratuite et équivalente sans tracking
- L’offre d’abonnement payant ne peut être qu’un choix supplémentaire
- La publicité contextuelle pourrait être une solution pour Meta
Cette décision marque un nouveau coup dur pour le modèle économique de Meta, qui repose massivement sur l’exploitation des données personnelles à grande échelle. Reste à voir comment le géant de la tech s’adaptera à ce nouveau cadre réglementaire européen de plus en plus strict.