Dans un rebondissement majeur pour l’avenir de TikTok aux États-Unis, la Cour Suprême a annoncé mercredi qu’elle entendrait la contestation par ByteDance et TikTok d’une loi qui imposerait le bannissement du réseau social dans le pays à moins qu’il ne se sépare de sa maison-mère chinoise d’ici le 19 janvier. Un nouveau chapitre s’ouvre ainsi dans la saga géopolitique autour de l’application, sur fond de tensions croissantes entre Washington et Pékin.
La Cour Suprême au cœur de la bataille pour TikTok
Le 10 janvier, les juges de la Cour Suprême entendront les arguments sur la question de savoir si cette loi, surnommée « vendre ou bannir », viole le Premier Amendement de la Constitution américaine qui garantit la liberté d’expression. On ignore encore quand la Cour rendra sa décision, qui pourrait avoir des répercussions majeures non seulement pour TikTok mais aussi pour l’ensemble du paysage technologique.
ByteDance et sa filiale TikTok avaient demandé lundi à la Cour Suprême de bloquer cette loi. La semaine dernière, les deux entreprises avaient déposé une requête en urgence auprès d’une cour d’appel pour obtenir un sursis temporaire, afin de donner à la Cour Suprême le temps d’examiner l’affaire sur le fond.
Cette bataille judiciaire intervient alors que l’administration Biden fait pression depuis des mois pour que ByteDance cède le contrôle de TikTok, au nom de la sécurité nationale et de la protection des données des utilisateurs américains.
Entre impératifs de sécurité et liberté d’expression
Au cœur des préoccupations de Washington se trouve la crainte que le gouvernement chinois puisse accéder aux données des utilisateurs américains de TikTok et les utiliser à des fins d’espionnage ou de désinformation. Des accusations que ByteDance et TikTok ont toujours fermement rejetées, affirmant mettre en place des garde-fous stricts pour protéger les données de leurs utilisateurs hors de Chine.
Mais au-delà des enjeux de sécurité nationale, cette affaire soulève aussi d’importantes questions sur la liberté d’expression et le rôle des réseaux sociaux. En forçant la vente ou l’interdiction de TikTok, le gouvernement américain ne porte-t-il pas atteinte au Premier Amendement et au droit des utilisateurs de s’exprimer et de s’informer librement ? C’est l’un des arguments avancés par ByteDance et TikTok devant la justice.
Le soutien inattendu de Donald Trump
Ironie de l’histoire, TikTok pourrait trouver un allié inattendu en la personne du président élu Donald Trump, qui s’était fait durant son précédent mandat le champion de la lutte contre l’application chinoise. Mais l’ancien et futur locataire de la Maison Blanche a récemment fait volte-face, promettant de « sauver » TikTok s’il revenait au pouvoir.
Selon CNN, le PDG de TikTok Shou Chew aurait même rencontré lundi Donald Trump dans sa résidence de Mar-a-Lago, signe que l’entreprise cherche des soutiens tous azimuts pour contrer les menaces qui pèsent sur son avenir aux États-Unis. Une stratégie risquée mais compréhensible vu l’enjeu : avec plus de 100 millions d’utilisateurs américains, le marché US est crucial pour TikTok.
2023, année charnière pour la tech sino-américaine
Au-delà du cas TikTok, l’année 2023 s’annonce charnière pour les relations technologiques entre les États-Unis et la Chine. Washington multiplie les mesures pour contrer l’influence de Pékin, comme en témoigne le récent durcissement des contrôles à l’exportation de semi-conducteurs vers la Chine.
Dans ce contexte de rivalité exacerbée, le sort de TikTok sera scruté de près comme un baromètre des tensions géopolitiques et un test majeur pour la souveraineté numérique dans un monde de plus en plus polarisé. La décision de la Cour Suprême, attendue dans les prochains mois, pourrait faire jurisprudence et redéfinir les contours du débat sur la régulation des géants tech à l’ère de la compétition sino-américaine.
- L’avenir de TikTok aux États-Unis est plus que jamais en suspens
- Enjeux de sécurité nationale et liberté d’expression s’affrontent
- 2023 sera une année charnière pour la tech dans la rivalité Chine-USA
Une chose est sûre : le dossier TikTok est loin d’être refermé et continuera de faire les gros titres dans les mois à venir. Entre impératifs de souveraineté et idéaux de liberté, l’issue de ce bras de fer judiciaire et géopolitique est plus incertaine que jamais. La Cour Suprême, arbitre de dernière instance, aura la lourde tâche de trancher ce nœud gordien du 21ème siècle. L’avenir de TikTok, mais aussi d’une certaine idée de l’internet mondialisé, se jouera en partie entre les murs de l’auguste bâtiment néoclassique de Washington.