La Fusion Nucléaire Franchit Une Étape Cruciale Avec Un Record Magnétique

Imaginez un monde où l’énergie serait abondante, propre et virtuellement inépuisable. C’est la promesse que nous fait miroiter la fusion nucléaire, et une récente avancée dans ce domaine donne un nouvel espoir quant à sa concrétisation. Une expérience menée à l’Université du Wisconsin-Madison a en effet permis de créer le champ magnétique stable le plus puissant jamais enregistré pour confiner un plasma, ouvrant la voie à des réacteurs de démonstration capables de produire plus d’énergie qu’ils n’en consomment.

Un record magnétique pour dompter la fusion

Au cœur de l’expérience WHAM (Wisconsin HTS Axisymmetric Mirror), on trouve de nouveaux aimants supraconducteurs fournis par la startup Commonwealth Fusion Systems (CFS). Une fois refroidis à leur température de fonctionnement et alimentés par un courant électrique intense, ces aimants ont produit un champ magnétique de 17 teslas, soit plus du double de celui utilisé dans les scanners IRM les plus puissants.

Cette prouesse est cruciale car la puissance de sortie d’un réacteur à fusion de type tokamak est proportionnelle au carré de l’intensité du champ magnétique utilisé pour confiner le plasma. Doubler cette intensité revient donc à multiplier par 16 la puissance produite. Les aimants de CFS ont ainsi permis à WHAM de battre le précédent record détenu par le réacteur expérimental Alcator C du MIT.

Deux approches complémentaires pour maîtriser la fusion

Si CFS mise sur une configuration magnétique de type tokamak, où le plasma prend la forme d’un tore (un « donut »), l’expérience WHAM et la startup Realta Fusion qui en est issue explorent quant à elles une approche dite du « miroir magnétique ». Dans celle-ci, deux aimants puissants placés à une certaine distance l’un de l’autre créent un champ magnétique qui confine le plasma en forme de « rouleau » :

  • Les aimants compriment le plasma à chaque extrémité
  • Les ions d’hydrogène rebondissent dans la partie centrale où ils entrent en collision et fusionnent, libérant de la chaleur

WHAM servira ainsi de banc d’essai pour optimiser cette configuration avant que Realta ne construise un réacteur de démonstration baptisé Anvil. Celui-ci sera similaire à WHAM mais de plus grande taille, et permettra non seulement de valider le concept à une échelle pré-industrielle, mais aussi de tester la tenue de différents matériaux dans les conditions extrêmes qui règnent au cœur d’un réacteur à fusion en fonctionnement.

Combiner les atouts pour accélérer le développement de la fusion

A plus long terme, Realta envisage de construire un réacteur encore plus grand appelé Hammer, qui utilisera cette fois deux aimants à chaque extrémité afin d’allonger la chambre de confinement et d’augmenter ainsi la puissance de sortie. Cette approche du miroir magnétique apparaît complémentaire de celle du tokamak privilégiée par CFS et d’autres acteurs.

Il est fascinant de voir comment les progrès réalisés dans une configuration inspirent et nourrissent ceux obtenus dans l’autre, les deux voies s’enrichissant mutuellement. C’est notamment le cas entre le MIT et CFS d’une part, et WHAM et Realta d’autre part.

Kieran Furlong, cofondateur et PDG de Realta Fusion.

Alors que la fusion nucléaire continue de progresser à grands pas, portée par une vague de startups ambitieuses et d’expériences prometteuses, on peut raisonnablement espérer que cette technologie révolutionnaire passera en quelques années du rêve à la réalité. Avec à la clé la perspective d’une énergie quasi-illimitée, sûre et respectueuse du climat, qui pourrait bien changer la face de notre civilisation. Le record magnétique établi par WHAM nous en rapproche un peu plus.

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