Alors que l’Union Européenne a récemment adopté l’AI Act, un règlement strict pour encadrer le développement de l’intelligence artificielle, le Japon a choisi de prendre le chemin opposé. Le pays du soleil levant mise sur une réglementation souple et flexible de l’IA, dans le but assumé de devenir « le pays le plus favorable à l’IA au monde ».
Le Japon veut attirer les géants de la tech et les startups IA
La stratégie du gouvernement japonais est claire : en proposant un cadre réglementaire léger et pro-business, il espère séduire les entreprises technologiques étrangères et les inciter à investir massivement dans l’archipel. Et cela semble fonctionner :
- Amazon a annoncé un investissement de 14 milliards de dollars dans le cloud computing d’ici 2027
- Microsoft et Google prévoient aussi d’importants investissements
- OpenAI, la startup derrière ChatGPT, a ouvert son premier bureau asiatique à Tokyo en avril
Pour le Japon, attirer ces géants représente une opportunité de créer de nouveaux emplois dans la tech et de bénéficier de ressources supplémentaires en puissance de calcul. Un enjeu crucial face au déclin démographique qui frappe le pays et à la pénurie de main d’œuvre qualifiée.
Une approche basée sur l’autorégulation de l’industrie
Plutôt que d’imposer des obligations strictes aux développeurs d’IA, comme le fait l’AI Act européen, le Japon mise sur une approche plus souple, laissant une large place à l’autorégulation par l’industrie elle-même. Le Conseil stratégique de l’IA, mis en place par le gouvernement, se concentre ainsi sur :
- Le ciblage des développeurs d’IA à haut risque et fort impact social
- L’obligation pour ces acteurs de signaler les risques au gouvernement
- La réalisation d’évaluations de sécurité par les entreprises elles-mêmes
Le Japon n’envisage pas de mettre en place une réglementation stricte, et il y aura aussi peu de réglementations que possible.
– Masaaki Tairi, membre du Parti libéral démocrate
Cette approche, directement inspirée des lois antitrust relativement souples du pays, semble pour l’instant rassurer les acteurs de l’IA. Mais face aux risques croissants des technologies d’intelligence artificielle, des voix s’élèvent au sein de la population pour réclamer un encadrement plus strict. Les règles pourraient donc évoluer dans les mois à venir.
L’IA au cœur des enjeux stratégiques mondiaux
Au-delà de la seule question réglementaire, la position du Japon sur l’IA s’inscrit dans un contexte géopolitique tendu, marqué par la rivalité technologique entre les États-Unis et la Chine. En se positionnant comme une terre d’accueil pour les entreprises de l’IA, l’archipel tente de tirer son épingle du jeu et d’éviter de se retrouver marginalisé.
Mais cette stratégie n’est pas sans risque. En pariant sur une réglementation a minima, le Japon pourrait se retrouver rapidement dépassé si les dérives de l’IA venaient à se multiplier. Il devra donc faire preuve d’agilité et être prêt à ajuster sa législation en fonction de l’évolution rapide du secteur. L’enjeu : trouver le juste équilibre entre soutien à l’innovation et protection des citoyens.