Après des années d’enquête antitrust, l’Union Européenne vient de clore le dossier Apple Pay. La Commission a en effet accepté une série d’engagements pris par Apple pour ouvrir son système de paiement mobile à la concurrence. Une décision qui va changer la donne pour les développeurs d’applications tierces et offrir plus de choix aux utilisateurs européens. Décryptage.
Retour sur l’enquête antitrust européenne
Tout a commencé en juin 2020 lorsque la Commission Européenne a ouvert une enquête formelle sur Apple Pay suite à plusieurs plaintes. Le géant américain était soupçonné d’abus de position dominante en bloquant l’accès des développeurs tiers à la technologie NFC de l’iPhone, indispensable pour proposer des paiements sans contact.
Deux ans plus tard, Bruxelles a rendu ses conclusions préliminaires, estimant qu’Apple avait effectivement restreint la concurrence en réservant l’accès NFC à son propre portefeuille Apple Pay. Une pratique jugée illégale au regard du droit européen de la concurrence.
Les engagements pris par Apple
Pour éviter une lourde sanction, Apple a proposé en janvier dernier une série d’engagements visant à ouvrir iOS aux portefeuilles mobiles concurrents :
- Accès gratuit aux fonctionnalités NFC via des API dédiées
- Possibilité de stocker les données de paiement de façon sécurisée sans passer par Apple Pay
- Accès aux fonctions comme Face ID pour authentifier les paiements
Des engagements que la Commission juge aujourd’hui suffisants après avoir consulté les acteurs du marché (banques, émetteurs de cartes, associations…). Apple a même dû renforcer certains points suite à leurs retours, preuve que le processus a été pris au sérieux.
Désormais, Apple ne pourra plus utiliser son contrôle sur l’écosystème iPhone pour exclure les portefeuilles mobiles du marché.
Margrethe Vestager, Commissaire européenne à la Concurrence
Quels changements pour les développeurs et utilisateurs ?
Concrètement, ces engagements, désormais contraignants pour Apple pendant 10 ans, vont permettre :
- Aux développeurs de portefeuilles tiers de proposer du paiement sans contact NFC depuis leurs apps iOS
- D’accéder à des fonctions clés comme le double-clic pour lancer rapidement l’app
- Aux utilisateurs de définir une app tierce comme portefeuille par défaut à la place d’Apple Wallet
De quoi stimuler l’innovation et la concurrence sur ce marché en plein essor du paiement mobile, tout en offrant plus de choix au consommateur européen. Des changements majeurs qui devraient entrer en vigueur d’ici le 25 juillet.
Au-delà d’Apple Pay, l’UE muscle sa régulation des géants tech
Cette décision sur Apple Pay s’inscrit dans un contexte de durcissement réglementaire de l’Union Européenne vis-à-vis des GAFAM. Le récent Digital Markets Act (DMA) vise justement à rendre les marchés numériques plus équitables et contestables.
Selon Margrethe Vestager, les engagements d’Apple vont même « plus loin que ce qu’exige le DMA », avec des mécanismes de surveillance et de résolution des litiges. Une complémentarité réglementation / engagement qui montre la volonté de l’Europe de reprendre la main.
Reste à voir comment ces changements seront mis en pratique et quel impact ils auront réellement sur le marché. Une chose est sûre, l’UE envoie un signal fort : le temps du monopole des géants tech sur certaines technologies stratégiques est révolu. Place à une concurrence plus juste et à des utilisateurs mieux protégés.