Et si les opérateurs télécoms devenaient les nouveaux géants du cloud ? Lors du Mobile World Congress 2025 à Barcelone, Arthur Mensch, CEO de Mistral, a surpris son audience avec une proposition audacieuse : transformer les telcos en hyperscalers. Dans un monde où l’intelligence artificielle redéfinit les infrastructures numériques, cette idée pourrait-elle être le tournant que l’Europe attend pour rivaliser avec les titans américains comme Amazon, Google et Microsoft ? Plongeons dans cette vision ambitieuse qui mêle technologie, business et stratégie continentale.
Une opportunité pour les telcos dans l’ère de l’IA
Arthur Mensch n’a pas mâché ses mots devant les délégués du plus grand salon mondial des télécommunications. Pour lui, les opérateurs télécoms ont une carte à jouer dans la révolution de l’intelligence artificielle. Alors que la demande en puissance de calcul explose, il propose aux telcos d’investir massivement dans la construction de data centers. Pourquoi ? Parce que l’IA, avec ses modèles toujours plus gourmands, nécessite une infrastructure robuste et locale. L’Europe, souvent à la traîne face aux hyperscalers américains, pourrait ainsi reprendre la main.
Mensch voit dans cette démarche une chance de décentraliser le cloud, aujourd’hui dominé par une poignée de géants. En clair, il s’agit de multiplier les acteurs capables de proposer des solutions d’hébergement et de calcul à grande échelle. Une vision qui résonne particulièrement dans le contexte actuel, où la souveraineté numérique est devenue un enjeu clé pour les entreprises et les gouvernements.
Mistral montre l’exemple avec son propre data center
Pour appuyer ses propos, Mistral ne se contente pas de parler : l’entreprise agit. En France, la startup construit actuellement son propre centre de données. Une initiative qui illustre sa volonté de descendre dans la chaîne de valeur, en passant de la création de modèles IA à la gestion d’infrastructures physiques. « Nous voulons servir les data centers », a déclaré Mensch, soulignant l’importance de contrôler les ressources nécessaires à l’innovation en IA.
« La révolution de l’IA offre une opportunité de décentraliser le cloud. »
– Arthur Mensch, CEO de Mistral
Cette démarche pragmatique montre que Mistral ne se limite pas à un rôle de fournisseur de logiciels. En investissant dans le hardware, la startup française envoie un signal clair : l’avenir de l’IA passe par une maîtrise complète de l’écosystème technologique.
Réduire la dépendance aux géants américains
Un autre axe fort de la stratégie de Mensch est de pousser les acteurs européens à s’émanciper des technologies américaines. Sans rejeter totalement les solutions d’outre-Atlantique – un pragmatisme assumé face à l’absence d’alternatives dans certains domaines –, il encourage les telcos à privilégier les solutions locales quand elles existent. Une manière de renforcer l’autonomie numérique de l’Europe tout en soutenant des entreprises comme Mistral.
Cette dépendance aux hyperscalers américains (Amazon Web Services, Google Cloud, Microsoft Azure) est un sujet brûlant. En 2024, ces trois acteurs concentraient encore plus de 60 % du marché mondial du cloud, selon les estimations. Face à ce constat, Mensch appelle à un sursaut collectif pour équilibrer les forces en présence.
La régulation : un frein ou un levier ?
Interrogé sur la régulation européenne, notamment l’AI Act, Mensch adopte une position nuancée. Contrairement à certains qui critiquent ouvertement les règles strictes de l’UE, il préfère pointer du doigt un autre problème : la fragmentation du marché. Avec 27 États membres appliquant parfois des interprétations différentes, les entreprises doivent jongler avec une mosaïque réglementaire. « Ce n’est pas la régulation en elle-même qui pose problème, mais cette fragmentation », explique-t-il.
Pour autant, il ne nie pas les défauts de l’AI Act. Arrivé trop tôt selon lui, ce texte se concentre trop sur les aspects techniques sans offrir de solutions pratiques pour son application. Mistral travaille donc avec les régulateurs pour ajuster le tir, preuve que l’entreprise préfère collaborer plutôt que s’opposer frontalement.
Consolidation des telcos : une solution stratégique
Pour accélérer cette transition vers un rôle d’hyperscaler, Mensch plaide pour une consolidation du secteur télécoms en Europe. Moins d’acteurs par marché, c’est moins de négociations pour des partenariats et plus d’efficacité dans les déploiements. Une idée qui pourrait séduire les opérateurs historiques, souvent freinés par une concurrence locale intense.
En France, Mistral a déjà franchi le pas avec un accord de distribution avec Free, filiale d’Iliad. Les abonnés Free peuvent ainsi accéder gratuitement à Le Chat Pro, l’assistant IA de Mistral, pendant un an. Une opération win-win qui illustre le potentiel des synergies entre IA et télécoms.
L’IA au service des réseaux de demain
Pourquoi les telcos devraient-ils écouter Mistral ? Parce que l’IA va transformer leurs réseaux. Avec des flux de données de plus en plus personnalisés, les infrastructures actuelles devront évoluer. Mensch anticipe des partenariats pour moderniser les réseaux, mais aussi pour réduire les coûts opérationnels des opérateurs grâce à l’automatisation et l’optimisation permises par l’IA.
Imaginez des réseaux capables de s’adapter en temps réel aux besoins des utilisateurs, ou des systèmes prédictifs qui anticipent les pannes. Ces avancées, rendues possibles par l’IA, pourraient devenir un argument de vente pour les telcos auprès de leurs clients.
Des modèles IA spécialisés comme avenir
En clôture de son intervention, Mensch a partagé sa vision pour les années à venir : des modèles IA de plus en plus spécialisés. Chez Mistral, l’objectif est de capter chaque interaction entre les utilisateurs et ses systèmes pour affiner ses algorithmes. « Nous voulons créer des IA sur mesure, adaptées à vos besoins », a-t-il promis.
Cette spécialisation pourrait révolutionner des secteurs comme le marketing digital, où des IA taillées pour des campagnes précises offriraient un avantage compétitif. Pour les startups et les entreprises tech, c’est une opportunité de se démarquer dans un marché saturé.
Les bénéfices pour les telcos en résumé
Que retenir de cette proposition audacieuse de Mistral ? Voici les avantages clés pour les opérateurs télécoms :
- Devenir des acteurs majeurs du cloud grâce aux data centers.
- Réduire leur dépendance aux hyperscalers américains.
- Moderniser leurs réseaux avec des solutions IA.
- Proposer des services innovants via des partenariats.
Un programme ambitieux qui pourrait redessiner la carte de la technologie européenne. À condition, bien sûr, que les telcos saisissent cette opportunité.
Et après ? Un écosystème IA européen à construire
Le discours de Mensch au Mobile World Congress n’est pas qu’une simple provocation. Il s’inscrit dans une dynamique plus large : celle d’un continent qui cherche à s’affirmer face aux puissances technologiques mondiales. En plaçant les telcos au cœur de cette stratégie, Mistral propose une alternative concrète au statu quo.
Pour les entrepreneurs et marketeurs qui lisent ceci, l’idée est inspirante. Et si votre prochaine innovation passait par une collaboration avec un opérateur télécom devenu hyperscaler ? Le futur de l’IA européenne pourrait bien se jouer là-dessus. Rendez-vous sur TechCrunch pour suivre les prochaines étapes de cette révolution en marche.