Patreon contraint par Apple de se plier à son système de paiement in-app

Le géant technologique Apple a récemment mis la plateforme de création Patreon au pied du mur, la menaçant d’une exclusion pure et simple de l’App Store si les créateurs continuent d’utiliser des options de facturation tierces non autorisées. Patreon se voit donc contraint d’entamer un processus de migration de 16 mois pour passer l’ensemble de ses créateurs au système d’achat in-app d’Apple d’ici novembre 2025.

Dans un billet de blog et un email adressé à ses créateurs, Patreon a détaillé les changements à venir pour les abonnements dans son application iOS. Dès novembre 2024, tous les créateurs seront basculés vers un système de facturation par abonnement, avec le choix de répercuter les commissions d’Apple sur le prix des abonnements ou de les absorber eux-mêmes. Les créateurs pourront toutefois opter pour un délai supplémentaire jusqu’en novembre 2025, mais au prix de ne plus pouvoir proposer d’abonnements dans l’app iOS en attendant d’adopter le système d’Apple.

Une application inégale des règles de l’App Store

Cette annonce souligne une fois de plus l’application à géométrie variable des règles de l’App Store, un grief régulièrement formulé par les détracteurs d’Apple, à l’instar du studio Epic Games qui a attaqué en justice le géant à la pomme pour des questions de concurrence. Si Epic a largement perdu son procès, le tribunal a toutefois jugé qu’Apple devrait autoriser des liens vers d’autres options de paiement dans les apps.

Patreon avait jusqu’ici réussi à exister dans une zone grise, certains de ses abonnements pouvant être consommés dans l’app et d’autres non, notamment car beaucoup d’utilisateurs ne découvrent pas directement les créateurs et contenus sur Patreon. Cela lui avait permis d’échapper aux exigences de facturation in-app d’Apple.

Des options peu satisfaisantes pour les créateurs

Face à la pression d’Apple, Patreon ne cache pas son mécontentement et souligne qu’aucune des deux options présentées aux créateurs n’est « idéale » :

  • Augmenter les prix des abonnements pour répercuter les commissions d’Apple
  • Absorber eux-mêmes le coût de ces commissions

La plateforme rappelle également que les frais d’Apple ne s’appliquent que sur iOS et que les créateurs pourront toujours proposer les mêmes tarifs sur le web et Android. Elle les encourage aussi à rediriger leurs fans vers un article de son centre d’aide expliquant les implications des achats sur iOS.

Une migration forcée au calendrier d’Apple

Dans son billet, Patreon souligne que la grande majorité de ses créateurs utilise un système de facturation par abonnement, qu’elle a progressivement déployé ces dernières années en s’attaquant à chaque obstacle pour garantir une transition en douceur. Une approche rendue impossible par le timing et les contraintes imposées par Apple :

Au lieu d’aider les créateurs à passer à la facturation par abonnement quand ils estiment que c’est le bon moment pour eux, nous sommes maintenant forcés de les faire migrer selon le calendrier d’Apple.

Un nouvel épisode dans la bataille des commissions d’Apple

Ce bras de fer entre Apple et Patreon s’inscrit dans le débat plus large sur les commissions prélevées par Apple sur son App Store et les règles parfois opaques et changeantes imposées aux développeurs. De nombreux acteurs, de Spotify à Epic Games en passant par Meta (Facebook), ont critiqué ce modèle, y voyant un abus de position dominante de la part d’Apple.

Si certains assouplissements ont eu lieu, notamment pour permettre des liens vers des options de paiement extérieures, la pression ne faiblit pas sur les éditeurs d’apps qui doivent se conformer aux exigences d’Apple sous peine d’exclusion. Une situation qui pourrait encore évoluer au gré des batailles juridiques et des évolutions réglementaires à venir.

En attendant, les créateurs de Patreon vont devoir s’adapter et choisir, non sans frustration, entre deux options peu satisfaisantes pour maintenir leur présence et leurs revenus sur l’immense marché des apps iOS. Un nouvel épisode qui illustre la difficile relation entre les plateformes de création et les gardiens des grands magasins d’applications.

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