Solid, Géant du Fintech, Dépose le Bilan : Que S’est-il Passé ?

Imaginez une startup prometteuse, surnommée « l’AWS du fintech », qui lève près de 81 millions de dollars auprès d’investisseurs prestigieux, affiche une croissance fulgurante et promet de révolutionner le secteur bancaire. Et puis, du jour au lendemain, elle s’effondre, déposant le bilan sous le regard médusé de l’écosystème tech. C’est l’histoire de Solid, une entreprise qui incarnait l’ambition démesurée des fintechs modernes, mais qui a succombé à des défis insurmontables. Que s’est-il passé ? Entre litiges coûteux, promesses non tenues et un marché impitoyable, plongeons dans les coulisses d’un naufrage qui résonne comme un avertissement pour les entrepreneurs et les investisseurs.

Une Ascension Météorique dans l’Univers Fintech

Lancée en 2018 à Palo Alto, Solid (anciennement Wise) avait tout pour séduire. Son objectif ? Simplifier la vie des entreprises fintech et SaaS grâce à une plateforme d’**APIs unifiées** offrant des services bancaires, des paiements, des cartes et même des solutions liées aux cryptomonnaies. Une proposition alléchante dans un secteur où l’intégration technologique est souvent un casse-tête. En août 2022, la startup annonce une levée de fonds de 63 millions de dollars en Série B, menée par FTV Capital, portant son financement total à près de 81 millions. À cette époque, sa valorisation atteint 330 millions de dollars selon PitchBook, et Solid revendique une croissance de revenus multipliée par dix, 100 clients et une rentabilité fraîchement acquise. Le rêve américain, version Silicon Valley.

Mais derrière ces chiffres impressionnants, des fissures commençaient déjà à apparaître. Comment une entreprise aussi prometteuse a-t-elle pu passer d’un tel sommet à une faillite en moins de trois ans ? La réponse se trouve dans une combinaison explosive de litiges, de défis financiers et d’un modèle économique peut-être trop ambitieux.

Un Litige Explosif avec FTV Capital

Le premier coup dur pour Solid arrive en 2023, sous la forme d’une poursuite judiciaire intentée par l’un de ses principaux investisseurs, FTV Capital. Ce dernier, qui avait injecté 61 millions de dollars lors de la Série B, accuse les cofondateurs Arjun Thyagarajan et Raghav Lal d’avoir menti sur les performances de l’entreprise. Chiffres de revenus gonflés, perte de clients dissimulée, promesses intenables : FTV dresse un tableau accablant et demande le remboursement intégral de son investissement, tout en réclamant la démission des deux dirigeants.

« Ils ont menti à FTV sur les revenus, le churn et l’état général de l’entreprise, trompant délibérément leurs investisseurs. »

– Extrait de la plainte de FTV Capital

Les cofondateurs ne se laissent pas faire et ripostent avec une contre-attaque judiciaire, qualifiant FTV de « firme de private equity agressive » qui cherche à récupérer ses fonds par des moyens déloyaux dès que l’investissement devient moins rentable. Ce bras de fer judiciaire, bien que soldé par un règlement à l’amiable en avril 2024, laisse des cicatrices profondes. Les frais juridiques s’accumulent, et la réputation de Solid en prend un coup, rendant toute nouvelle levée de fonds quasi impossible.

Une Faillite sous Chapter 11 : Restructuration ou Vente ?

Le 7 avril 2025, Solid dépose officiellement une demande de protection sous le **Chapter 11** auprès du tribunal des faillites du Delaware. Ce mécanisme, souvent utilisé par les entreprises américaines pour tenter une restructuration, vise à donner une chance à Solid de se redresser ou de trouver un repreneur. Avec seulement 760 000 dollars de dettes non garanties, 7 millions en liquidités (dont 2 millions bloqués) et une équipe réduite à trois employés, la startup est loin de ses jours de gloire.

Arjun Thyagarajan reste optimiste malgré la tempête :

« Après avoir exploré toutes les options, nous pensons que le Chapter 11 est la meilleure voie. Nous sommes confiants qu’un acheteur adéquat émergera. »

– Arjun Thyagarajan, cofondateur de Solid

Mais cette déclaration soulève des questions : qui voudrait racheter une entreprise fragilisée par des litiges et incapable de lever de nouveaux fonds depuis 2022 ? Le pari est risqué, et le processus de vente supervisé par le tribunal sera déterminant.

Les Signaux d’Alerte d’un Modèle BaaS Fragile

Solid n’est pas un cas isolé. Le secteur du **Banking-as-a-Service (BaaS)**, qui promet de démocratiser l’accès aux services financiers via des APIs, semble montrer ses limites. En avril 2024, Synapse, une autre startup BaaS, avait elle aussi déposé le bilan, espérant une vente à 9,7 millions de dollars qui n’a finalement pas abouti. Fait troublant : les deux entreprises partageaient un partenaire bancaire commun, Evolve Bank & Trust, dont la fiabilité est aujourd’hui remise en question par certains acteurs comme Mercury, qui a coupé les ponts avec cette institution.

Pour les experts, ces échecs pointent du doigt une vérité inconfortable : le modèle BaaS, bien qu’innovant, repose sur des bases fragiles. Entre dépendance aux partenaires bancaires, coûts opérationnels élevés et concurrence féroce, les marges de manœuvre sont minces.

Les Leçons pour les Startups et Investisseurs

L’histoire de Solid est un miroir tendu à l’écosystème des startups. Voici ce qu’on peut en retenir :

  • La transparence est cruciale : les litiges comme celui avec FTV montrent que masquer les failles peut coûter cher.
  • La scalabilité ne fait pas tout : une croissance rapide ne garantit pas la pérennité sans une base solide.
  • Les partenariats comptent : un maillon faible, comme un partenaire bancaire instable, peut faire tomber toute la chaîne.

Pour les entrepreneurs dans le marketing, la tech ou la crypto, cet échec rappelle l’importance d’une stratégie claire et d’une exécution irréprochable. Quant aux investisseurs, il souligne le besoin d’une due diligence approfondie, au-delà des pitchs flamboyants.

Quel Avenir pour Solid et le Secteur Fintech ?

Alors que Solid tente de se relever via une restructuration ou une vente, l’avenir reste incertain. Le secteur fintech, lui, continue d’évoluer à vitesse grand V, porté par l’**intelligence artificielle**, les cryptomonnaies et les attentes croissantes des consommateurs. Mais une chose est sûre : les échecs comme celui de Solid servent de piqûre de rappel. Innover, oui, mais avec prudence et rigueur.

Et vous, que pensez-vous de cette chute ? Est-ce la fin d’un modèle ou une simple étape dans la maturation du fintech ? Une chose est certaine : dans le monde impitoyable des startups, même les géants autoproclamés peuvent trébucher.

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MondeTech.fr

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