Booking.com Écope d’une Amende de 450 Millions d’Euros pour Abus de Position Dominante en Espagne

Le mastodonte des réservations en ligne Booking.com vient de se voir infliger une amende salée de 413,24 millions d’euros par l’autorité de la concurrence espagnole, la CNMC. Cette sanction, annoncée mardi, fait suite à une enquête ouverte en octobre 2022 après des plaintes déposées par l’Association espagnole des directeurs d’hôtel et l’Association régionale des hôtels de Madrid.

Une position dominante abusée pendant 5 ans

Selon les conclusions de l’enquête, Booking.com a abusé de sa position dominante sur le marché espagnol pendant au moins 5 ans, de janvier 2019 à aujourd’hui. La plateforme détenait en effet une part de marché comprise entre 70% et 90% pour la fourniture de services d’intermédiation de réservation en ligne aux hôtels par les agences de voyages en ligne sur cette période.

La société a commis deux abus de position dominante depuis au moins le 1er janvier 2019 jusqu’à aujourd’hui en imposant diverses conditions commerciales déloyales aux hôtels situés en Espagne qui utilisent ses services d’intermédiation de réservation et en restreignant la concurrence des autres agences de voyages en ligne.

CNMC

Des clauses tarifaires et juridiques déloyales

Parmi les pratiques épinglées, on retrouve :

  • Une clause tarifaire empêchant les hôtels de proposer des prix inférieurs sur leurs propres sites à ceux affichés sur Booking.com, alors même que la plateforme se réservait le droit de réduire unilatéralement les tarifs.
  • Des conditions générales rédigées uniquement en anglais et soumises au droit néerlandais, rendant les recours plus difficiles et coûteux pour les entités espagnoles.
  • Un manque de transparence sur la valeur apportée par les programmes d’abonnement payants permettant aux hôtels d’améliorer leur classement.

Une concurrence restreinte

Mais c’est surtout le volet « restriction de concurrence » qui a été sanctionné à hauteur de 206,62 millions d’euros. La CNMC reproche à Booking.com d’avoir utilisé le nombre total de réservations comme critère de classement par défaut, incitant ainsi les hôtels à concentrer leurs réservations en ligne sur la plateforme au détriment d’agences concurrentes.

Des critères de performance basés essentiellement sur la rentabilité de chaque hôtel pour Booking.com sont aussi pointés du doigt, tout comme des obligations comportementales pour accéder et rester dans certains programmes d’abonnement.

Un recours probable, dans l’attente du Digital Markets Act

Sans surprise, le géant du voyage conteste vigoureusement les conclusions et compte faire appel de cette décision « sans précédent ». Booking.com considère que le Digital Markets Act, qui le désigne comme « contrôleur d’accès » depuis mai, est le bon forum pour traiter ces questions de manière harmonisée à l’échelle européenne. Le DMA imposera en effet de nouvelles règles aux grandes plateformes numériques dès novembre prochain.

En attendant, cette amende record constitue un avertissement clair envoyé aux mastodontes du web tentés par des pratiques anticoncurrentielles. Elle pourrait aussi faire jurisprudence et inspirer d’autres autorités nationales. La lutte pour un marché équitable et transparent dans l’économie numérique ne fait que commencer…

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