Dans un contexte où l’agriculture doit nourrir une population mondiale croissante tout en réduisant son impact environnemental, la recherche de solutions innovantes et durables est devenue primordiale. C’est dans cette optique que la start-up française Micropep explore le potentiel des micropeptides, de minuscules protéines naturellement présentes dans les plantes, pour développer une nouvelle génération de pesticides plus sûrs et efficaces.
Les micropeptides, des molécules longtemps ignorées
Pendant des années, les chercheurs ont négligé les gènes codant pour les micropeptides, considérant que ces protéines de moins de 100 acides aminés étaient trop petites pour avoir une fonction significative. Pourtant, des études récentes ont révélé que les micropeptides jouent un rôle crucial dans de nombreux processus biologiques :
- Développement des organes
- Communication intra et intercellulaire
- Régulation des fonctions cellulaires
Cette capacité à agir comme des interrupteurs moléculaires, activant ou désactivant certaines fonctions, fait des micropeptides des candidats prometteurs pour le développement de pesticides de nouvelle génération.
Un mode d’action ciblé et spécifique
L’approche de Micropep consiste à utiliser des micropeptides capables de cibler spécifiquement les agents pathogènes des plantes, comme certains champignons. Appliqués sur les feuilles des cultures, ces micropeptides attendent l’arrivée des spores fongiques. Lorsqu’une spore se pose et commence à se développer, le micropeptide s’attaque à la membrane cellulaire du champignon, provoquant son autodestruction.
Notre premier produit cible les feuilles de soja. Nous avons trouvé des moyens d’optimiser la stabilité du micropeptide pendant quelques jours. Mais dans le sol, la persistance est très brève.
– Thomas Laurent, PDG de Micropep
Cette spécificité d’action permet d’envisager des traitements plus ciblés et moins toxiques que les pesticides chimiques conventionnels, qui affectent souvent une large gamme d’organismes, y compris des espèces bénéfiques.
Stimuler les défenses naturelles des plantes
Au-delà de leur action directe sur les pathogènes, les micropeptides pourraient également aider à renforcer les défenses immunitaires des plantes. Cependant, la lutte contre les agresseurs mobilise de l’énergie au détriment de la croissance et du rendement. L’enjeu est donc d’activer les bons mécanismes de défense au bon moment.
Pour y parvenir, Micropep développe des modèles prédictifs permettant de sélectionner les micropeptides les plus prometteurs. Cette année, l’entreprise prévoit de tester 1000 à 2000 candidats en laboratoire, puis les 50 à 100 meilleurs en serre, avant de passer aux essais au champ avec un nombre encore plus restreint de molécules.
Un marché fragmenté et très concurrentiel
Si les premiers résultats sont encourageants, il reste encore plusieurs défis à relever avant de voir les micropeptides de Micropep sur le marché. L’entreprise doit notamment améliorer la persistance de ses molécules dans l’environnement et obtenir les autorisations réglementaires nécessaires. Elle espère lancer ses premiers produits aux États-Unis et au Brésil d’ici 2028, puis en Europe vers 2030.
Pour s’imposer sur un marché des pesticides très fragmenté et concurrentiel, Micropep mise sur des partenariats avec des acteurs établis, capables d’intégrer ses ingrédients actifs dans leurs formulations et de les distribuer auprès des agriculteurs.
C’est un marché très fragmenté et très compétitif. Vous avez des agriculteurs qui cultivent du soja et d’autres qui font du raisin. Il faut donc trouver des moyens d’atteindre ces différents clients.
– Thomas Laurent, PDG de Micropep
Avec un récent tour de financement de 29 millions d’euros, Micropep dispose des moyens nécessaires pour accélérer le développement et la commercialisation de ses solutions innovantes. Si elle parvient à tenir ses promesses, cette jeune pousse pourrait bien révolutionner la protection des cultures en offrant une alternative plus sûre et durable aux pesticides de synthèse, contribuant ainsi à rendre l’agriculture plus respectueuse de l’environnement et de la santé humaine.