Il faut une sacrée dose de cran pour refuser une offre d’acquisition de 23 milliards de dollars de la part de Google. C’est pourtant le pari audacieux qu’a fait la startup de sécurité cloud Wiz, voyant dans cette proposition une validation de son potentiel à rester indépendante et viser encore plus haut.
Google a connu des hauts et des bas ces dernières semaines. La bonne nouvelle : pour la première fois, sa division cloud – qui comprend les logiciels SaaS Google Workspace et les services d’infrastructure Google Cloud – a généré 10 milliards de dollars sur le trimestre. De quoi atténuer la déception d’avoir raté deux acquisitions potentielles à plus de 20 milliards de dollars en moins d’un mois.
De HubSpot à Wiz : Les Cibles de Choix de Google
Le premier échec fut l’abandon du rachat, longtemps pressenti, de l’éditeur de CRM et logiciels marketing HubSpot, basé à Boston. Aucun prix n’a fuité, mais la capitalisation boursière de HubSpot avoisine les 30 milliards de dollars. La rumeur, née en avril, s’est éteinte début juillet quand Bloomberg a révélé que les deux entreprises allaient finalement poursuivre des routes séparées.
Dans la foulée, une nouvelle rumeur faisait surface : Google aurait jeté son dévolu sur Wiz, la pépite de la sécurité cloud valorisée 12 milliards de dollars. Le montant évoqué – 23 milliards de dollars – aurait constitué le plus gros chèque jamais signé par Google pour une acquisition. Un record pour une entreprise qui n’avait jusqu’ici jamais dépassé les 12,5 milliards.
Le Refus de Wiz : Confiance Absolue Dans Son Avenir
Pourquoi diable refuser une offre aussi mirobolante ? Dans un email aux employés de Wiz, le PDG Assaf Rappaport a expliqué que lui et ses cofondateurs croient dur comme fer en leur capacité à construire une entreprise encore plus grande, et qu’ils sont prêts à miser gros sur eux-mêmes.
Bien que flattés par les offres reçues, nous avons choisi de poursuivre notre route pour bâtir Wiz. Nos prochaines étapes : 1 milliard de dollars d’ARR et une IPO. Décliner des propositions aussi impressionnantes est difficile, mais avec notre équipe exceptionnelle, je suis confiant dans ce choix.
– Assaf Rappaport, PDG de Wiz
Les Raisons Possibles de l’Échec : Valorisation, Due Diligence ou Stratégie ?
Les raisons derrière l’échec d’une transaction de cette envergure peuvent être multiples. Pour Chirag Mehta, analyste chez Constellation Research, trois scénarios sont envisageables :
- Wiz voulait sonder le marché avant une éventuelle IPO, estimant pouvoir décrocher encore plus que les 23 milliards proposés.
- Google a découvert quelque chose qui lui a déplu lors de la due diligence.
- Le prix était en réalité inférieur aux 23 milliards de dollars évoqués, et Wiz s’en servirait comme base pour attiser l’intérêt d’autres acquéreurs potentiels ou de nouveaux investisseurs.
Le contexte réglementaire a aussi pu peser. Les entreprises ont peut-être anticipé un long processus pour obtenir le feu vert des régulateurs, à l’image du projet de rachat de Figma par Adobe, bloqué dans les limbes réglementaires pendant plus d’un an avant d’être abandonné.
Wiz Conforté Dans Son Potentiel de Croissance Autonome
Mais Wiz a aussi pu voir dans l’intérêt de Google une validation de sa trajectoire en solo. Récemment, la société annonçait un ARR dans les 350 millions de dollars. D’ici 2025, elle vise le milliard. À ce stade :
- L’offre de Google valorisait Wiz 46 fois son ARR actuel
- Et 23 fois son ARR projeté pour 2025
Un pari audacieux pour une startup qui avait pourtant démarré sur les chapeaux de roues lors de son lancement en janvier 2020, à l’aube de la pandémie. En 18 mois, Wiz était devenue la startup au milliard de dollars d’ARR le plus rapidement de l’histoire. Un exploit rendu possible par le succès antérieur des fondateurs qui, en 2012, avaient créé Adallom avant de le revendre à Microsoft pour environ 300 millions de dollars trois ans plus tard.
Quoi qu’il en soit, ce nouvel échec confirme les difficultés de Google à conclure des méga-acquisitions, malgré les atouts de son activité cloud en plein essor. Un coup dur pour le géant qui aurait pu, via ces rachats, doper encore davantage sa croissance sur ce marché ultra-concurrentiel.